Puissante autorité traditionnelle du Cameroun, le sultan des Bamouns est sous le feu des projecteur depuis l'été dernier. Des tensions entre communautés font vaciller son trône.
Le souverain des Bamouns est-il menacé de destitution ? Monté sur le trône en 2021, à l’âge de 28 ans, le sultan Nfonrifoum Mbombo Njoya Mouhamed Nabil est sous le feu des critiques depuis l’été dernier.
Des affrontements ethniques sur fond de remise en cause du pouvoir du sultan
À la suite des affrontements survenus le 8 août 2024 dans la localité de Magba entre les membres de la communauté Bamoun et Tikar, qui ont coûté la vie à une personne, plusieurs blessés et des destructions matérielles, diverses personnes pointent du doigt la responsabilité du monarque des Bamouns, une des plus importantes monarchies du Cameroun. A l’origine de cet événement tragique, plusieurs messages de haine diffusés sur les réseaux sociaux qui ont mis le feu au poudre à la veille du festival de Ngouon, désormais inscrit au patrimoine universel de l’Unesco. Pour le peuple Tikar (dont on dit qu’ils natifs de l’Égypte pharaonique), le responsable ne serait autre que le sultan des Bamouns, « accusé d’avoir incité les siens à orchestré ces violences » et d’avoir envoyé sa garde royale.
L’entourage du sultan des Bamouns nie fermement que le monarque a été à la source de ces affrontements, liant cette bataille de rue à des ambitions de quelques membres de la famille royale mécontents du règne du sultan Nfonrifoum Mbombo Njoya Mouhamed Nabil et qui auraient tout intérêt à ce qu’un conflit tribal éclate. « Il s’agirait bel et bien des manœuvres insidieuses et dolosives des personnes tapies dans l’ombre, qui veulent voir Bamoun et Tikar en guerre », assure une source proche du palais royal. Dans la foulée des affrontements, le sultan des Bamouns avait appelé à « la cohésion et l’unité sociale ».
Une dynastie indissociable de l'histoire du Cameroun
Proche du parti du Président Paul Biya, le sultan Nfonrifoum Mbombo Njoya Mouhamed Nabil a le soutien du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), Sa responsabilité dans les événements survenus en marge du festival n’ont pas été clairement établis. Il est peu probable que son trône soit menacé en dépit des tergiversations d’une presse qui affirme que celui-ci est vacillant.
Souverain de 2 millions d’habitants, c’est au cours du XIVe siècle que le royaume Bamoun a été établi. Convertis à l’islam, les rois qui se succédent, vont progressivement agrandir leur territoire avant d’être confronté à la colonisation européenne. Le sultan Ibrahim Njoya, (1876-1933), qui a inventé une écriture pour sa monarchie, va réussir à préserver l’autonomie de son empire au fur et à mesure que les colons allemands se font de plus en plus pressants. Une colonisation qui est aussi source de tensions religieuses avec l’apparition du christianisme. L’histoire de la monarchie Bamoun va dès lors se mélanger avec celle de l’occupation prussienne puis franco-britannique.
Ibrahim Mbombo Njoya (1937-2021), petit-fils du précédent, va jouer un rôle important dans la décolonisation et la lutte pour l’indépendance obtenue en 1960. Il occupera divers postes gouvernementaux jusqu’en 1990, faisant de lui un acteur incontournable de la vie politique locale. Un héritage recueilli par son fils, le sultan Nfonrifoum Mbombo Njoya Mouhamed Nabil, qui a ouvert récemment un musée dédié à l’histoire du sultanat.