La Maison brésilienne des Saxe-Cobourg et Bragance

« Depuis mon plus jeune âge je m'intéresse beaucoup à l'histoire de mon pays, même si je n'ai pas l'honneur d'être né au Brésil ! Je pense que nous devons connaître notre passé et en être fiers. Malheureusement nos politiciens, à quelques exceptions près ne s'y intéressent pas. Du temps de l'Empire, les hommes politiques pensaient aux générations futures, aujourd'hui davantage à leurs réélections ». Descendant de l’empereur Dom Pedro II, le prince Carlos Tasso de Saxe-Cobourg et Bragance est le chef de la troisième branche de la maison impériale du Brésil. Si elle ne revendique pas le trône d’une monarchie renversée en 1889, après 67 ans d’existence, pour certains brésiliens, cet ancien producteur de café est la solution à la crise dynastique qui divise les Orléans-Bragance entre partisans des Petrópolis et des Vassouras. 

C’est un prince discret. A 90 ans, le prince Carlos Tasso de Saxe-Cobourg et Bragance jouit d’une retraite méritée. Il est né à Vienne, loin de l’Amérique du Sud, berceau d’une branche méconnue de la Maison impériale brésilienne des Orléans-Bragance. Dans ses veines coule le sang de Louis-Philippe Ier d’Orléans. Carlos Tasso de Saxe-Cobourg et Bragance descend du prince Louis-Eugène de Saxe-Cobourg-Kohary (1845-1907), petit-fils du dernier roi des Français qui fut un temps pressenti pour occuper le trône de Grèce. Une candidature  sérieuse qui échouera pour des questions religieuses. Dans sa famille, hors de question de renoncer au catholicisme pour l’orthodoxie. A défaut de couronne, ce sera la marine autrichienne avant que les contraintes de ses devoirs ne se rappellent à lui. Empereur du Brésil depuis 1831,  Dom Pedro II n’a pas de fils. Il envisage de marier le prince Louis-Eugène à son aînée Isabelle et Gaston d’Orléans à sa cadette Léopoldine. Le destin en décidera autrement et les deux cousins germains finiront par échanger leurs fiancées. « Elle était une mère exemplaire et avait un grand esprit patriotique. Elle peignait très bien et aimait la flore de son Brésil  comme elle disait » raconte le prince Carlos Tasso de Saxe-Cobourg et Bragance qui a consacré une biographie à son aïeule.  « Elle a eu une vie courte,  décédée à  23 ans en 1871,  mais pleine d'intensité. Elle avait un grand amour pour ses compatriotes qu'elle aida par de nombreux dons aux orphelinats. Ce serait bien si la ville de Léopoldina voulait bien honorer aussi son mari en donnant son nom à une rue » poursuit Carlos Tasso de Saxe-Cobourg et Bragance, intarissable sur le sujet. 

Louis-Eugène de Saxe-Cobourg-Kohary fera ses preuves au front contre les argentins et les uruguayens (1865-1870) mais à son retour, des tensions éclatent avec l’empereur qui trouve son gendre trop « creux » et qui le suspecte de comploter pour monter sur le trône. Il est vrai que ses relations avec son cousin Gaston sont tout aussi exécrables. Particulièrement prolifique, Léopoldine a déjà eu 3 enfants quand Isabelle n’en a toujours aucun. A cette époque, ils font figure d’héritiers. Et en particulier, Pierre (1866-1934) qui va connaître les privilèges de son statut avant d’être soudainement rétrogradé de position avec la naissance du fils aîné d’Isabelle en 1875. Un traumatisme pour ce prince sujet à des migraines, de l'insomnie, des tremblements et de l'arythmie cardiaque qui en gardera rancune. Il va nourrir ses propres ambitions pour la couronne, reste très populaire au sein de la bourgeoisie qui craint les idées libérales de la famille impériale. Et lorsque Dom Pedro II tombe sévèrement malade, certains le poussent à s’avancer. L’heure de gloire sera de courte durée, l’empereur se rétablit et apprend ses intrigues. Pierre de Saxe-Cobourg-Kohary est poussé au putsch par ses partisans au grand dam de son père. Les tensions au palais de Rio de Janeiro sont tendues quand survient le coup d’état qui met fin à la monarchie quelques mois plus tard. Un exil forcé qui le plonge dans la folie et à l’instar de sa cousine , Charlotte de Belgique, souveraine déchue du Mexique, il est interné à la maison de santé de Tulln an der Donau, en Basse-Autriche.

« Dom Pedro II a toujours voulu donner à son pays une perspective et une image de progrès, de culture et de liberté » affirme Carlos Tasso de Saxe-Cobourg et Bragance qui défend l’héritage de l’empereur, héros d’un nouveau téléfilm diffusé actuellement au Brésil. «  Beaucoup ont dit qu'il était républicain. Il n'était pas du tout républicain » tient à rappeler le prince. Les droits au trône de sa maison sont passés au prince Auguste (1867-1922), frère de Pierre. Le grand-père de Carlos Tasso de Saxe-Cobourg et Bragance souffrira tout autant que son frère de l’exil qui a forcé cet amoureux de la mer à démissionner de la marine. Son nom circulera même pour une éventuelle restauration mais lui n’est pas intéressé par ces cabales. Un mariage illustre avec une archiduchesse de Toscane ne donnera pas moins de 8 enfants. Dont la princesse Thérèse-Christine de de Saxe-Cobourg et Bragance (1902-1990), mère du prince Carlos Tasso.  Autorisée à revenir au Brésil en 1922, sa branche récupère enfin sa nationalité que la princesse sera d’ailleurs la seule à souhaiter l’acquérir. C’est cette passion qu’elle transmet à son fils. 

« Depuis mon plus jeune âge je m'intéresse beaucoup à l'histoire de mon pays, même si je n'ai pas l'honneur d'être né au Brésil ! Je pense que nous devons connaître notre passé et en être fiers. Malheureusement nos politiciens, à quelques exceptions près ne s'y intéressent pas. Du temps de l'Empire, les hommes politiques pensaient aux générations futures, aujourd'hui davantage à leurs réélections » explique Carlos Tasso de Saxe-Cobourg et Bragance. « Je suis un écrivain modeste, un chercheur passionné, mais écrire pour moi au Brésil est presque une obligation afin de corriger les fausses histoires écrites à propos de notre famille. L'histoire, malheureusement, est écrite par les gagnants » regrette le prince qui ne verrait pas d’un mauvais œil le retour de la monarchie. 

« Je suis un conglomérat de nationalités. J'ai des parents partout dans le monde, italiens, allemands, anglais, portugais, espagnols. J'essaie de tirer le meilleur parti de chacune de ces origines » continue le prince Carlos Tasso de Saxe-Cobourg et Bragance, ancien Président du Rotary International Club. Pour beaucoup de monarchistes épuisés par la querelle qui opposent les deux branches rivales des Orléans-Bragance depuis le siècle dernier, comparable à celle qui se poursuit encore aujourd'hui en France entre légitimistes et orléanistes, il est une option non négligeable qui pourrait faire consensus. Et si Carlos Tasso de Saxe-Cobourg et Bragance n’a jamais fait acte de prétention, ses détracteurs rappellent qu’il n’est pas successible au trône puisque le mariage de son père, Lamoral von Taxis, avec sa mère n'est pas considéré comme égal aux yeux des lois dynastiques. Sait-on jamais ! 

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