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La monarchie cambodgienne accueille le dirigeant communiste chinois

La République populaire de Chine et le royaume du Cambodge entretiennent une amitié de longue date. Le dirigeant communiste chinois effectue actuellement une visite d'État alors que la monarchie célèbre à la fois son nouvel An et le cinquantième anniversaire d'une tragédie qui a marqué l'histoire de l'Asie.  

Le président chinois Xi Jinping a débuté, ce jeudi 17 avril 2025, une visite d'État au Cambodge, marquée par une cérémonie d'accueil à l’aéroport de Phnom Penh, où il a été reçu personnellement par le roi Norodom Sihamoni, le président du Sénat, Samdech Techo Hun Sen, et plusieurs hauts responsables cambodgiens. Des centaines de Cambodgiens agitant les drapeaux des deux pays, scandant des slogans en faveur de l’amitié sino-cambodgienne, ont été mobilisés à cette occasion pour accueillir le dirigeant chinois.

Un déplacement qui intervient, dans le cadre d'une tournée en Asie,  alors que le royaume célèbre le Nouvel An khmer. Le leader du Parti communiste chinois (PCC) a adressé  ses « vœux les plus chaleureux au gouvernement et au peuple cambodgiens » au nom de la Chine. Il a également souligné la richesse de la civilisation khmère, saluant les efforts de développement du Cambodge qui a permis, selon lui, une croissance économique continue et l’amélioration des conditions de vie dans le royaume. Dans un communiqué rendu public, le dirigeant chinois a insisté sur la solidité des relations bilatérales, forgées selon lui par les « générations précédentes de dirigeants des deux pays » et renforcées par des décennies de coopération.

Un héritage diplomatique initié sous Norodom Sihanouk

Les relations sino-cambodgiennes contemporaines trouvent leur origine dans les choix géopolitiques du roi Norodom Sihanouk (1922-2012), véritable architecte de la diplomatie cambodgienne du XXe siècle. Dès la fin des années 1950, marqué par une vision socialiste, le monarque se rapproche de la Chine communiste dans le cadre d'une politique de neutralité que le roi a mis en place. En 1958, il établit des relations diplomatiques officielles avec la République populaire de Chine, un geste rare pour un pays non communiste à l’époque, qui lui vaut l’estime durable de Pékin.

L’alliance entre Sihanouk et la Chine devient encore plus concrète après le coup d’État de 1970, lorsqu’il est renversé par le général Lon Nol. Exilé, Sihanouk est accueilli en grande pompe à Pékin, où il résidera une grande partie des deux décennies suivantes. Le Président Mao Zedong et le Premier ministre Zhou Enlai le traitent avec tous les égards d’un chef d’État en exil, lui offrant protection, logement, staff médical et soutien logistique. Durant son exil, Sihanouk devient presque une figure sino-cambodgienne, partageant sa vie entre activités politiques, musicales et cinématographiques, toujours protégé (ou sous la surveillance) par les dirigeants chinois. Parallélement, l'idéologie marxiste va permettre aux Khmers rouges de Pol Pot de s'emparer du pouvoir en 1975 et mettre en place un régime qui va faire des millions de morts durant 4 ans. Un génocide dont le cinquantième anniversaire coïncide avec la visite du président chinois. C’est encore en Chine que Norodom Sihanouk crée le Front uni national du Kampuchéa, soutenu par Pékin, et qu’il accepte, non sans réticence, une alliance tactique avec les Khmers rouges.

Même après son retour triomphal au Cambodge en 1991 et sa restauration sur le trône deux ans plus tard, les liens entre Norodom Sihanouk et Pékin ne se sont jamais distendus. Il continuera à effectuer des séjours réguliers en Chine, où il finira par s’éteindre en 2012. Ce lien très personnel entre le monarque et Pékin a profondément marqué la politique étrangère cambodgienne. La Chine a toujours reconnu le rôle central de Norodom Sihanouk dans le développement des relations bilatérales. En 2008, Jia Qinglin, président du Comité national de la Conférence consultative politique du Peuple chinois, a qualifie le défunt souverain de « vieil et bon ami connu depuis longtemps par tous les Chinois ». Il a même que l'amitié sino-cambodgienne est un trésor partagé par les deux peuples depuis plus de 50 ans. Une politique que son fils, le roi Norodom Sihamoni, a poursuivi, incarnant une continuité historique dans les relations sino-cambodgiennes, désormais étendues à l’économie et la défense du pays.

Une coopération tournée vers l’avenir

Lors de cette visite, Xi Jinping a exprimé sa volonté de « consolider l’amitié » et de « promouvoir la coopération » dans un contexte régional marqué par les tensions en mer de Chine méridionale. Pour Pékin, le Cambodge reste un allié stratégique dans l’ASEAN, souvent perçu comme une voix favorable à ses intérêts.Le Premier ministre Hun Manet et son père, Hun Sen, devenu président du Sénat, une dynastie omniprésente dans les affaires internes du royaume, poursuivent la ligne politique d’un partenariat fort avec la Chine, axé sur les investissements, les grands projets d’infrastructure , mais aussi un rapprochement politique sur les questions de sécurité et de cybersurveillance.

Cette visite d’État vient ainsi rappeler que les relations entre la République populaire de Chine et la monarchie cambodgienne ne se limitent pas à des échanges économiques : elles s’inscrivent dans une continuité historique, façonnée par des figures comme Norodom Sihanouk et portée aujourd’hui par ses successeurs.

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 18/04/2025

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