Le Maharaja Pragmulji III de Kutch est mort du COVID-19

L’information est tombée en fin de matinée hier et a été reprise par l’ensemble de la presse indienne. Maharrao Pragmalji III, prétendant au trône indien de Kutch depuis l’abolition de la monarchie en 1948, est décédé de complications liées au covid-19.  Agé de 85 ans, il n’avait aucun enfant. Avec sa mort, s’ouvre la difficile question de sa succession au trône car il n’avait pas désigné d'héritier officiel pour lui succéder.  Une maison royale qui a conservé toute son aura dans le Gujarat. 

Fils aîné du dernier Maharaja en titre de Kutch, Maharrao Pragmalji III incarnait encore le symbole d’une Inde victorienne et fascinante aux senteurs de safran et de curry. L’annonce de son décès à 85 ans, des suites de complications liées au virus du covid-19, a provoqué la stupeur dans un pays encore attaché à ses traditions monarchiques. Le premier ministre nationaliste Narendra Modi, lui-même, a fait part de sa profonde tristesse et envoyé ses condoléances à la maison royale de Kutch. Personnage haut en couleurs et doté d’une fortune considérable, ce descendant de la dynastie Jadeja, aux origines persanes, était aussi un politicien redoutable qui se battait pour récupérer l’indépendance de son état dont la monarchie avait été abolie en 1948. 

Lorsqu’il naît le 3 mai 1936, l’Inde est encore sous la domination de l’empire britannique. Maharrao Pragmalji grandit dans le palais royal et fait ses études primaires au Mayo College d'Ajmer. Il va suivre tous les soubresauts politiques que traverse une Inde désireuse de s’affranchir de la tutelle anglaise. Un pays aux multiples facettes qui va tomber dans une dérive ethno-religieuse très violente. Son grand-père, le Maharaja Vijayarajaji Khengarj, s’enthousiasme pour les idées du Mahātmā Mohandas Karamchand Gandhi, figure spirituelle et emblématique du combat pour la liberté. Il fera même don de 61 kilomètres carrés de terres àdes réfugiés hindous afin qu'ils puissent s’installer et y vivre en paix.

Mais les temps de la monarchie de Kutch sont déjà comptés et sa décision de rejoindre la nouvelle union ne préservera pas le trône du sort qui l’attend. Maharrao Pragmalji perd son grand-père le 26 janvier 1948.  Il devient prince héritier d’une principauté qui n’a plus que quatre mois à vivre avant de se fondre dans le nouvel état qui sombre dans le chaos. Diplômé de l'Hindu College et de l'Université de Delh, Maharrao Pragmalji suit son père au gré de ses nominations comme ambassadeur, en Norvège ou au Chili entre 1957 et 1961. Si les maharajas ne règnent plus, ils conservent encore du pouvoir dans leurs états. Avec la fin de leurs privilèges, l’argent ne rentre plus suffisamment. Maharao Madansinhji, héritier de la couronne, doit s’adapter et transforme ses palais en établissements touristiques de  luxe ou en musée. Le tout rassemblé au sein d’un trust dont va hériter Maharrao Pragmalji à la mort de son père, en 1991. Une fortune estimée en dizaines de milliards de dollars et que vont se disputer devant les tribunaux les divers membres de cette famille. Conforté dans ses titres et propriétés, Pragmalji III tente à diverses reprises de rependre son autonomie de New Delhi.  Lorsqu’un tremblement de terre frappe le Gujarat en 2001, ce prince charismatique, toujours souriant, s’empresse d’accueillir des sans-abris, ses palais victimes d’importants dommages architecturaux. 

Il avait épousé la Maharani Priti Devi, princesse de l’état voisin de Tripura, également touchée par le covid dont elle se remet actuellement. Un mariage qui ne fut pas couronné d’enfants. Et c’est toute la question qui va agiter désormais cette ancienne principauté au trône vacant. Selon toutes probabilités, c’est son troisième frère, le prince Shri Hanva ntsinhji Madansinhji Sahib, 80 ans et père de deux fils, qui devrait lui succéder comme Maharaja. Ironie de l'histoire, il avait été un des contestataires du testament royal lorsque Maharrao Pragmalji III avait été intronisé souverain de jure de Kutch. Une maison royale qui préside la destinée de cette ancienne principauté depuis le XIIème siècle.

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