« Sous la domination ottomane, après 1458, personne ne saigna même du nez pendant des centaines d'années en Grèce. Tout comme Jérusalem ou d'autres endroits [de l’empire-ndlr] ». L’arrière-arrière-petit-fils du sultan Abdul Hamid II, le Sehzade (prince) Ohran Osmano?lu est l’un des membres de la maison impériale qui affiche publiquement (et le plus) son soutien à la politique expansionniste du Président Recep Tayyip Erdo?an. Et c'est sans compter, toutes ces véritables odes journalières à la gloire d’un empire tombé en 1924 qu’il affiche sur les réseaux sociaux. Nationaliste panturque, Ohran Osmano?lu rêve de voir la Turquie de reprendre sa place d’honneur au sein du monde musulman.
Il a 57 ans, soutient ouvertement le Président Recep Tayyip Erdo?an et n’hésite pas à le faire savoir sur les réseaux sociaux qu’il affectionne. Plus de 50 000 personnes le suivent quotidiennement sur Facebook ou Twitter. Sehzade Ohran Osmano?lu est l’arrière-arrière-petit-fils du sultan Abdul Hamid II. Souverain de Turquie de 1876 à sa déposition en 1909, Abdul Hamid II va assister, de son vivant, à la lente mais certaine décomposition de l’empire Ottoman. Il incarne alors le dernier pouvoir autoritaire d’une dynastie qui a conquis Constantinople en 1453. Un événement baptisé du nom de « Fatih » (Conquête) dans l’histoire turque comme celui du navire de forage au centre d’une polémique entre Bruxelles, Paris, Athènes et Ankara. Farouchement panturque, le prince n’a pas hésité à se moquer du Président français en publiant une photo d’un Emmanuel Macron grimaçant devant un menaçant Erdogan, qui prévient son homologue des problèmes auxquels il pourrait faire face. Un tweet en écho aux avertissements récents que le président turc a adressé à la France samedi dernier après que celle-ci ait manifesté son mécontentement face aux velléités expansionnistes de l’ancienne « Sublime Porte » en mer Méditerranée. D’ailleurs, le prince Ohran a également surenchéri en reprochant aux français, leur responsabilité dans le génocide rwandais, les accusant d’avoir contribués à la mort de millions de personnes dans l’Afrique des Grands Lacs.
Officiellement autorisés à vivre dans leur pays depuis 1974, les Osmano?lu ont largement été réhabilités depuis deux décennies. Encore dernièrement, le gouvernement a posté des gardes en uniformes impériaux près du tombeau d’Osman, le fondateur de la maison Osmano?lu, où se côtoient drapeaux de l’empire et ceux de la république. Lors d’un entretien en août dernier, Sehzade Ohran Osmano?lu a manifesté sa gratitude au président Erdogan, « sensible au sort de sa famille ». Même si il ne souhaite pas entrer officiellement en politique, le prince n’hésite pas à prendre position. Il n’a pas caché sa joie quand la basilique byzantine Sainte Sophie est redevenue officiellement une mosquée. Les membres de sa famille, reconvertis dans tous les domaines, se sont d’ailleurs précipités dans ce haut lieu saint de la chrétienté pour y prier tandis qu’à l’extérieur, des partisans de la monarchie n’hésitaient pas à crier leur satisfaction dans les rues de la ville. « La Grèce ne peut prétendre à avoir des droits sur [la basilique de] Sainte-Sophie» avait même affirmé le prince Ohran à la presse, faisant fi des protestations des gouvernements européens dont la Grèce qui s'est toujours considérée comme une héritière de Constantinople.
« Sous la domination ottomane, après 1458, personne ne saigna même du nez pendant des centaines d'années en Grèce. Tout comme Jérusalem ou d'autres endroits [de l’empire-ndlr] » a rappelé le prince impérial dans une certaine vision provocatrice de l’histoire qui lui est propre. Le descendant du « Sultan rouge » entend être le chantre d’un nationalisme ottoman renaissant qui a déjà reposé ses fondations en Syrie, Libye et qui dirige encore une partie de Chypre depuis que l’armée turque s’est emparée du nord de l’île en 1974. « L'histoire turque est pleine de victoires et je crois de tout cœur que son avenir sera de nouveau plein de victoires. Nous vivons une période de transition. J'espère qu'un jour viendra où les prochaines générations ressusciteront cette magnifique histoire » a déclaré Ohran Osmano?lu, le 30 août. Il a même suggéré que soit introduit un calendrier célébrant les grande batailles de l’empire et qui « permettra d’honorer les martyrs ». En Juin 2019, le Sehzade (qui officie aussi au Croissant rouge, l'équivalent de notre Croix rouge) avait d'ailleurs fêté à sa manière la victoire de la Turquie sur la France en éliminatoires de l'Euro 2020 : il avait publié un photomontage d'une Tour Eiffel illuminée des couleurs nationales de la Turquie. Tout un symbole pour cette dynastie qui a décidé de lier son histoire contemporaine à l’avenir politique de l'ismalo-conservatiste président Recep Tayyip Erdo?an et qui espère bien remonter sur le trône d'un empire reconstitué.
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Photos@Orhan Osmano?lu