A Postdam, le prince héritier Hohenzollern s’oppose aux Reichburger

La manifestation a rassemblé très peu de monde au lendemain de l’anniversaire de la chute de l’empire allemand mais suffisamment pour que le maire de Postdam s’en émeuve. Chef de la maison impériale des Hohenzollern, le prince Georg Friedrich von Preußen, s’est agacé de la récupération de l’image de sa famille par les Reichbürger (mouvement des citoyens du Reich), un mouvement d’extrême-droite où se retrouvent monarchistes, nationalistes et théoriciens du complot.

Les Reichbürger ont fait une entrée brutale sur la scène médiatique allemande fin août en tentant de pénétrer de force dans le Bundestag de Berlin, le parlement allemand. Drapeaux tricolores aux bandes noires-blanches-rouges horizontales de l’ancien empire allemand, le mouvement des citoyens du Reich récuse tout droit d’existence à l’actuel état fédéral né au lendemain de la réunification allemande en 1989. Avec la crise du coronavirus et se plaçant dans le sillage de l’AfD (Alternative pour l’Allemagne), le nombre de ses adhérents a augmenté (18000 en 2019) et réunit désormais aussi bien des monarchistes que des complotistes ou des nationalistes, nostalgiques du nazisme, en son sein. Le 14 novembre dernier, ils ont annoncé une manifestation à Postdam, aux abords du château de Sans-Souci, le Versailles prussien de Frédéric II le Grand, une icône chez les Reichbürger. A l’annonce de rassemblement, en dépit des restrictions sanitaires, liberticides selon les citoyens du Reich,  le maire social-démocrate de la ville, Mike Schubert, a immédiatement téléphoné à l’héritier de la couronne, le prince Georg Friedrich von Preußen. Une affaire qui embarrasse les Hohenzollern alors que ceux-ci tentent depuis des années de récupérer leurs biens nationalisés en 1945, accusés d’avoir contribué et financé la montée du parti nazi durant l’Entre-deux-guerres. Un débat qui fait rage parmi les historiens et les allemands largement divisés sur le sujet. Tout comme le parlement actuel. Pour l’arrière-arrière-petit-fils du Kaiser, hors de question de soutenir les Reichburger « complètement coupés des réalités » et leurs théories complotistes.

« Nous voulons notre empereur ». Le 14 novembre, ils étaient à peine 150 à s’être réunis pour commémorer la chute de l’empire allemand en 1918. Entre deux drapeaux floqués de l’aigle impérial, ils avaient installés deux tables avec des machines à écrire, « seuls éléments permettant de produire des cartes de citoyenneté légitime ». Face à eux une contremanifestation de 70 personnes, les deux camps séparés par un cordon de policiers. Aux journalistes venus couvrir l’événement, «l'Empire a été la période la plus heureuse de l'histoire allemande, une époque de libertés » a déclaré un des orateurs de cet événement qui estime que le prince Georg Friedrich von Preußen à toute sa place pour être « cet empereur de la paix » qui peut faire face «  à la dictature de [la chancelière Angela] Merkel ».  Parmi les participants, certains espèrent même que les présidents Donald Trump ou Vladimir Poutine vont aider à réaliser leurs rêves de restauration de la monarchie.

Interrogé, l’héritier de la couronne a nettement pris ses distances avec ce mouvement ou de leurs revendications et s’étonne même que ces monarchistes le considèrent comme la «  clé de la paix mondiale ».  « Nous constatons avec inquiétude que les citoyens du reich, avec leurs positions, sont en dehors de notre constitution » a déclaré lui-même le maire de Postdam qui a tout de même empêché la manifestation de converger vers le palais de Sans-Souci, en accord avec le prince héritier et la Fondation prussienne des palais et des jardins de Berlin-Brandebourg. « Il est hors de question d’utiliser notre histoire [monarchique] allemande de manière idéologique » a déclaré Georg Friedrich von Preußen très agacé. «L'Allemagne  actuelle nous offre une liberté, une paix et une prospérité qui peu ont connu avant eux eux.  Il est important de regarder notre histoire avec ses côtés autant que positifs que négatifs » a ajouté le prétendant au trône impérial, proche de la CDU-CSU (droite). Un Hohenzollern qui a déjà condamné publiquement et à diverses reprises les agissements de l’extrême-droite allemande.

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