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Franz de Wittelsbach, une vie au service de la Bavière

Le prince Franz de Wittelsbach a récemment soufflé ses quatre-vingt-dix bougies. Collectionneur passionné, cet héritier d’une des plus vieilles monarchies d’Europe est l’actuel prétendant au trône de Bavière. Dernier témoin d’une période troublée, ce catholique convaincu a récemment publié ses mémoires, « Spectateurs du premier rang ». Onze chapitres qui nous plongent dans l’histoire d’un homme qui a caressé l’espoir de redonner son indépendance à une des plus belles régions d’Allemagne. 

Cheveux blancs, crâne dégarni par le temps, lunettes vissées sur le visage, le prince Franz de Wittelsbach a le sourire. C’est un homme heureux qui a fêté ses quatre-vingt-dix ans, qui a traversé les tumultes du XXe siècle, qui a préservé toute sa vie l’héritage culturel et historique de sa famille, accompagné depuis des décennies par son compagnon avec lequel il partage sa vie. Profondément catholique, le duc de Bavière a fait son « coming-out », en 2021. Un vrai « buzz » médiatique pour ce qui était en réalité un vrai secret de polichinelle au sein de l’aristocratie. Il a publié ses mémoires, intitulées « Spectateurs du premier rang »,  où il se livre sans fard, fruit d’une collaboration étroite avec l’historienne et professeur Marita Krauss.

Les parents du prince Franz de Bavière @wikicommons

Des nuages bruns au-dessu de son berceau

C’est le 14 juillet 1933 que le prince Franz Bonaventura Adalbert Maria pousse ses premiers cris. Il est le fils du prince Albrecht de Bavière (1905-1996) et de la princesse Maria Drašković von Trakošćan (1904-1964), fille d’un chambellan de la cour impériale austro-hongroise. Premier garçon d’une fratrie de 4 enfants, Franz de Bavière ignore encore le poids qui pèse sur ses épaules. Héritier d’une monarchie emportée par une révolution, quelques jours avant la fin de la Première Guerre mondiale, le futur chef des Wittelsbach doit sa couronne royale à Napoléon Ier.  Sa naissance fait la joie de ses parents. Pourtant derrière les sourires, Albrecht et Maria cachent mal leur inquiétude respective. Leader du parti national-socialiste, Adolf Hitler a accédé au pouvoir six mois auparavant. Le nouveau chancelier allemand ne cache pas sa haine de cette dynastie aux personnages fantasques (comme le roi Louis II, infatigable constructeurs de châteaux et dont la mort reste entourée d’un mystère),  dont les partisans l’ont empêché de réussir son « putsch de la Brasserie » en 1923. Hitler craint que le prince Ruprecht (1869-1955), prétendant à la couronne, ne soit proclamé roi d’une Bavière sécessionniste et qu’il ne devienne le chef d’un front de résistance au nazisme. Les premières années de vie du prince Franz s’assombrissent aussi vite que le ciel du nouveau Reich. Dès 1934, la maison royale prend la décision de prendre le chemin de l’exil vers la Yougoslavie puis la Hongrie. Les Wittelsbach font profil bas, mais soutiennent toute action qui pourrait mettre fin au régime de Herr Hitler. 

Trois générations de Baviere  :Ruprecht Albrecht, Franz

Prince héritier de Bavière 

L’attentat raté du 20 juillet 1944 va marquer un nouveau chapitre dans la vie du jeune prince qui en garde encore des souvenirs précis. Accusant les membres de la famille royale d’avoir aidé les putschistes, le Führer ordonne l’arrestation du prince Albrecht, de sa femme et de ses enfants, déportés dans les camps de concentration de Buchenwald, de Flossenbürg et de Dachau. Un épisode qu’il raconte dans ses mémoires, décrivant des montagnes de cadavres s'accumulant devant sa fenêtre, le vol d'un faisan luisant au soleil au-dessus du camp de Dachau, l'horreur et les actes de brutalité perpétrés par les nazis sur les prisonniers ou encore la cohésion d’une famille qui fait face avec dignité à ses tortionnaires. Un emprisonnement qui prendra fin lorsque le camp de Dachau est libéré par les Alliés en 1945. Le duc de Bavière va rester à jamais marqué par cette expérience dont il est sorti vivant. Il va enfin pouvoir vivre son début d’adolescence dans la paix et la tranquillité. En novembre 1945, le jeune prince part étudier au pensionnat bénédictin de l'abbaye d'Ettal puis au Collège Saint-Michel de Fribourg. Il entreprend des études en administration des affaires qu'il complète en 1960 par un diplôme en économie. Il a partagé les problèmes de ses compatriotes, les moments de disette (il considère la crème et le beurre comme des trésors. Aujourd'hui encore, il hésite à laisser du pain qu'il n'a pas mangé au cours d'un repas copieux) s’est considérablement rapproché de son grand-père qui va l’initier à sa passion des arts. Il commence ses premières représentations au nom de la famille royale. Le prince est un cœur à prendre mais qui ne présente guère d’affinités pour le sexe opposé. Mais à cette époque, il n’était guère convenable de parler de cela encore moins de le revendiquer au risque de se voir mettre au ban de la dynastie. Très rapidement, le prince François de Bavière prend conscience de son rôle, de l’importance de préserver tout le patrimoine d’un pays attaché à ses traditions folkloriques. Il s’immerge dans la vie culturelle et sociale de Munich, découvre de nouvelles formes d'art et partage même des repas avec les gitans.

 

 

Un amoureux des Arts 

Lors de son voyage initiateur en Amérique du Nord en 1962, il va développer un véritable attrait pour l'art contemporain. Aux États-Unis, il rencontre des artistes de premier plan et des collectionneurs influents, entre au Conseil international (comité consultatif) du Museum of Modern Art de New York, et va créer d’importantes galeries d’art à Munich, la capitale de la Bavière. Sous l'influence de sa mère, le prince Franz s'est également engagé très tôt à aider les personnes en situation de détresse, comme en 1956 en faveur des réfugiés hongrois fuyant le communisme. Il va financer l'association d'aide de Nymphenburg, dont les activités s'étendent également au-delà de la Hongrie vers la Roumanie, la Bulgarie et l'Albanie. Plus récemment, il a décidé de soutenir les projets éducatifs de son neveu, le prince Ludwig (futur héritier au trône), en Afrique.

Franz de Baviere et Thomas Greinwald @Youtube/BR24/Screenshot

Un prétendant au trône fier de ses racines

Le prince reste attaché à l'Église catholique. Durant des années, celui qui aurait pu hériter du trône catholique d’Angleterre si l’Histoire n’en avait pas décidé autrement, a été impliqué dans les comités de l'Académie catholique de Bavière. Il apprécie « extrêmement bien » le cardinal munichois Reinhard Marx, écrit t-il, un prélat qu’il voit comme un « porteur d'espérance pour l'Église « Le duc Franz a été  et est bien plus qu'un simple spectateur, comme le montrent clairement ses mémoires. Il a l'avantage inestimable de pouvoir transmettre sa riche expérience aux hommes politiques issus de toutes les régions d’Allemagne, en particulier les Premiers ministres bavarois. » écrit son propos Anton Hötzelsperger dans le Samerberger Nachrichten. « Je considère qu'il est de notre devoir de représenter les intérêts du pays si nécessaire, même vis-à-vis des gouvernants politiques. Cela inclut la question fondamentale du fédéralisme » affirme d’ailleurs le prince Franz de Bavière, réputé proche de la droite allemande (CDU-CSU). Plus surprenant, on apprend dans ses mémoires que le chef de la maison royale soutient l’idée d’une Bavière indépendante et l’importance de la placer sur la scène internationale. « C'est mon ambition que la Bavière ne reste pas un Länder mais conserve sa propre voix - en Allemagne, mais aussi à l’échelle internationale » déclare le prétendant au trône, soutenu par divers mouvements et associations. 

À l’aube de sa fin de vie, il n’aspire plus qu’à une seule chose. Finir ses derniers jours aux côtés de l’homme qu’il a toujours aimé, Thomas Greinwald, dans cet esprit de tolérance et de solidarité envers les autres qui caractérise le prince Franz de Bavière.

Copyright@Frederic de Natal

Date de dernière mise à jour : 25/07/2023

Commentaires

  • Legendre

    1 Legendre Le 04/08/2023

    Long vie à vous deux et beaucoup de bonheur.
    A un des ces jours peut-etre !

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