Il y a quelques jours, le parti Vert d’Allemagne a réclamé que le Bundestag clarifie sa position sur les demandes de compensation financière de la maison impériale des Hohenzollern. Depuis des années, les descendants du Kaiser Guillaume II réclament que l’état fédéral lui restitue ses anciennes propriétés, meubles et autres objets d’arts nationalisés après la fin la seconde guerre mondiale. Accusés d’avoir aidé financièrement les nazis à prendre le pouvoir, les Hohenzollern affirment au contraire avoir contribué à sa chute en résistant de l’intérieur. Un débat qui divise aussi bien la population allemande que les historiens. Alors que les prochaines élections législatives se profilent, les Verts tentent de mettre dans l’embarras la CDU/CSU connue pour être assez favorable aux Hohenzollern. Ils viennent de déposer un projet de loi qui mettrait fin aux négociations entre le prince Georg Friedrich von Preußen et Berlin mais qui a toutefois peu de chances d'aboutir.
Le débat fait rage en Allemagne depuis les révélations de négociations secrètes entre la maison impériale des Hohenzollern et le gouvernement fédéral en 2019. Privés de leurs biens en 1945, accusés d’avoir collaboré avec les nazis, les descendants du Kaiser Guillaume II se défendent par voies légales et tentent de réécrire l’histoire en leur faveur. Un chapitre douloureux qui a provoqué un vif débat dans un pays où partisans de la dynastie et opposants s’affrontent violemment sur les réseaux sociaux. Pour les écologistes, sixième parti parlementaire, les Hohenzollern sont coupables d’avoir participé à la montée en puissance d’Adolf Hitler en finançant son parti et d’avoir fermé les yeux sur les exactions du régime. Il y a un an, lors d’une allocution au Bundestag, ils ont réclamé publiquement que l’affaire fasse l’objet d’une « pleine transparence » et convaincus de la « culpabilité » des Hohenzollern, ont annoncé qu'ils rejetaient toutes les demandes d’indemnisation du rejeton impérial. Largement médiatisé, ce feuilleton anachronique ne peut- être « décidé par le ministère d’état mais doit être porté sur la place publique » avec en renfort, journalistes et historiens » affirment les Verts. Lesquels sont l’objet de l’ire impériale du prince qui ne supporte pas que l’on remette en question les actes de résistances de sa famille au nazisme. Deux écoles qui s’invectivent à coup de preuves et contre-preuves historiques par médias interposés.
Le 22 janvier dernier, les Verts ont remis une nouvelle couche au débat. « Selon la loi sur l'indemnisation des personnes expropriées, les paiements ne sont possibles que si les personnes concernées n’ont jamais aidée significativement le national-socialisme. Il est temps de clarifier cette question par un vote officiel » ont réclamé les écologistes lors de la session parlementaire. Selon le projet de loi qu’ils ont déposé, celui-ci affirme que « la voix des historiens doit être prise en compte » en tant « qu’opinion majeure » du débat. Ils ont même exigé que la commission sénatoriale désignée se retire des négociations entre le gouvernement fédéral et les Hohenzollern. Une proposition qui est loin d’être anodine car si elle était votée, elle serait un coup d’arrêt brutal aux demandes du prince Georg Friedrich von Preußen. Les historiens allemands lui sont majoritairement défavorables. Parmi eux Christopher Clark qui fait office en la matière et qui expliquait encore récemment au quotidien « Spiegel » que des « documents incriminent directement » le prince héritier Guillaume [fils du Kaiser-ndlr], comme « cette lettre de 1934 au magnat du britannique Lord Rothermere, dans laquelle il se vante de la façon dont il a aidé Hitler sur le chemin du pouvoir ». « Il était un sympathisant du national-socialisme et a toujours soutenu Hitler. Il a été assez stupide de croire que celui-ci l’aiderait à monter sur un trône qu’il lui avait promis comme tant d’autres qui pensaient pouvoir manipuler Hitler » poursuit cet auteur de divers ouvrages sur la question.
La maison impériale des Hohenzollern n’a pas réagi à l’annonce de ce projet de loi qui a toutefois peu de chances d’aboutir sous l’actuelle mandature qui prendra fin en septembre prochain. Jusqu’à présent, elle n’a fait que mobiliser une armée d’avocats qui se chargent d’attaquer tous ceux qui tenteraient de s’immiscer historiquement dans ce débat. Des hommes de loi qui veillent à promouvoir une image aussi lisse que possible des descendants du dernier empereur du Reich défunt. Qui n'en restent pas moins.. verts de rage.
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