Diplômé en économie, il préside IECSA, une société d'équipements scientifiques ainsi que Neftan, une entreprise financière internationale, basée à Londres. Francisco de Borbón y Escasany, cinquième duc de Séville, a accordé un entretien au quotidien El Mundo, quelques jours après le mariage de son fils héritier. Le roi Juan Carlos, le prince Alphonse de Bourbon, les Orléans, ses relations internationales, sa famille, ce cousin du roi Felipe VI et prince du sang (si la France était une monarchie) a livré ses vérités à la presse.
C’est un nom qui respire l’Histoire de l’Espagne et qui à toutes les senteurs de l’Andalousie. Francisco de Borbón y Escasany est le cinquième duc de Séville, le cousin du roi d’Espagne. Dans son sang coule l’histoire de l’Europe, celle d’une branche capétienne de la maison Bourbon qui a compté de nombreux personnages truculents et qui détient son titre depuis 1823. A 77 ans, il regarde le passé sans nostalgie, évoque l’importance de porter le nom d’une dynastie fondée par Henri IV et qui a porté bien des couronnes, prétendu à d’autres sans succès. « C’est une tradition essentiellement familiale, un nom pour lequel j'ai beaucoup de respect et que je défendrai toujours » explique Francisco de Borbón y Escasany au journaliste d’El Mundo venu l’interviewer. Il a rédigé ses mémoires, l’occasion de clarifier ses positions dynastiques, évoquer les personnalités sulfureuses qu’il a côtoyé et posé un regard admiratif sur ses trois enfants.
Il ne figure pas dans l’ordre de succession au trône d’Espagne en raison des multiples mariages morganatiques des membres de sa famille mais dans celui de France, version légitimiste, il est placé à la sixième place. Si l’Hexagone décidait de renouer avec ses lys, il serait probablement un des premiers princes du sang comme le faisait remarquer le bimestriel « Bourbon » d’août 1996. Il revient sur la montée sur le trône de Juan-Carlos et ne mâche pas ses mots. Selon lui, tout a été fait pour écarter son oncle aîné, le prince Don Jaime (ou Henri-Jacques de Bourbon), d’une couronne qui lui revenait de droit. « Ils l’ont forcé à démissionner » explique Francisco de Borbón y Escasany qui confesse qu’il éprouvait pour le prince Alphonse de Bourbon, une « véritable amitié ». Un sentiment qu’il aurait également pour son fils, le prince Louis-Alphonse de Bourbon même s’il reconnaît que le mariage de son père, invalide au regard des lois dynastiques du pays, l’a empêché de monter sur le trône d’Espagne. « Il y a ceux qui pensent que la démission de Don Jaime n'a jamais été ratifiée par les Cortes et que son fils Alphonse aurait du être roi » tient-il toutefois à préciser. Difficile de savoir si on doit y voir un message caché pour l’actuel duc d’Anjou qu’une minorité de monarchistes bleus verrait bien succéder à Felipe VI. Tout comme une autre minorité de monarchistes français ne verrait pas d’un mauvais œil sa propre candidature au trône de Saint-Louis comme le fut avant lui entre 1897 et 1942, son arrière-grand-père François de Paule de Bourbon, autre ...duc d'Anjou.
« Il n’a jamais pu devenir roi et cela l’a frustré toute sa vie. Finalement, il était plus enclin à aspirer au trône de France où il a beaucoup plus de droits que les Orléans » affirme Francisco de Borbón y Escasany à propos du prince Alphonse, décédé tragiquement en 1989. Entre les Séville et les Orléans, un vielle animosité qui perdure depuis le XIXème siècle et qui se poursuit encore aujourd’hui à travers l’Ordre militaire et hospitalier de Saint-Lazare. Le premier duc de Séville, Henri de Bourbon (Enrique de Borbón y Borbón) ne cachait pas son agacement des intrigues orchestrées par Antoine d’Orléans, duc de Montpensier et beau-frère de la reine Isabelle II. Promu au rang d’infant d’Espagne, le fils du roi Louis-Philippe ne cachait pas sa volonté de monter sur le trône madrilène et a plusieurs fois trempé dans des complots afin d’installer une nouvelle dynastie, connue aujourd’hui sous le nom d’Orléans-Galliera. Les deux princes en viendront en main et se retrouveront dans des camps opposés. Un siècle plus tard, les épées ont été rangées dans leurs fourreaux mais Séville et Orléans se sont encore âprement affrontés pour la titulature de Grand-maître de l’Ordre militaire et hospitalier de Saint-Lazare. Depuis Francisco de Borbón y Escasany a renoncé à sa charge en 2008 après 12 ans de présidence et l’a légué à son fils héritier, Francisco de Paule. Tout comme Charles-Philippe d’Orléans deux ans après, son principal concurrent lui aussi grand-maitre d’une des nombreuses dissidences de cet ordre.
« La situation du roi-émérite est compliquée » explique le duc de Séville. « Ce serait une grande erreur historique si on ne se souvenait de Juan Carlos que pour ce dont il a été accusé récemment alors qu’il a tant contribué à ce que l'Espagne devienne une démocratie » déclare Francisco de Borbón y Escasany, persuadé qu’il n’a pas été mis au courant des intrigues de « celle dont il est tombé sous le charme ». A propos de sa famille, il parle de son épouse défunte, la comtesse Beatrice von Hardenberg qui aimait plus la vie mondaine de Madrid et son métier de rédactrice en chef du magazine « Elle » que son foyer, ses enfants dont il est fier, en particulier de sa fille Olivia, enfant rebelle, et du décès de sa cadette en février 2020, un mois avant Beatrice von Hardenberg. Plus insolite, il se livre sur un dîner avec l’ancien président vénézuélien Hugo Chavez, « un personnage ennuyant qui n’arrêtait pas de parler », ses rencontres avec Saddam Hussein, l’ancien dirigeant d’Irak, un « type sympathique mais qui n’avait pas d’argent en fait, une invasion de son pays basé sur un mensonge et sa destitution qui a été une erreur », Mu’ammar Kadhafi, le guide de Libye, un homme « antipathique, grossier et vulgaire » ou encore l’actuel président de Guinée équatoriale, Teodoro Obiang qui n’a pas hésité à rançonner un ingénieur d’une de ses sociétés et à réclamer un montant d’un million d’euros pour prix de sa libération.
Francisco de Borbón y Escasany, duc de Séville, finalement une « vie intense, riche et passionnante » comme le résume sa fille Olivia.
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