Depuis l’échec de la proclamation de la république en 2017, les indépendantistes catalans ont accentué leur pression sur la monarchie Bourbon. En visite à Barcelone, avec le premier ministre Pedro Sanchez, le roi Felipe VI a été accueilli par des manifestations antimonarchiques qui n’ont pas hésité à brûler des portraits du souverain. Une visite sous haute tension alors que la classe politique se déchire sur l’avenir de la royauté en Espagne.
« Bienvenue en république catalane ». Ce sont des milliers de manifestants qui attendaient, le 9 octobre, le roi Felipe VI et le Premier ministre Pedro Sanchez venus assister à une remise de prix « d’innovation économique » pour de grandes entreprises, au sommet de la Barcelona New Economic Week. Une visite sous haute tension, trois ans après le référendum anticonstitutionnel organisé par les indépendantistes en Catalogne et qui intervient deux semaines après que le président catalan, Quim Torra, ait été démis de ses fonctions par la Cour suprême espagnole : «Nous vivons une époque sans précédent, les difficultés sont énormes, mais nous savons que les nouvelles opportunités naissent toujours des difficultés. Pour en profiter, il ne suffit pas d’espérer ou d’attendre, il faut être préparé, il faut les chercher, et savoir en profiter » a déclaré le roi Felipe VI à l’assistance, occultant les incidents qui ont émaillé le parcours de son voyage. Portraits du souverain brûlés devant les caméras, slogans anti-royalistes (Joan Carles Primer. Felip l ' Dernier. #CoronaCiao, Muerte al Borbón [Juan Carlos Premier. Felipe le Dernier. Adieu à la monarchie, mort au Bourbon]) et drapeaux catalans au vent, le roi a évité de rencontrer les séditieux rassemblés dans le centre- ville de Barcelone. Une capitale de la Catalogne entièrement bouclée par les forces de police.
Grands absents, les autorités barcelonaises dont la maire Ada Colau, qui ont boycotté la venue du roi en signe de protestation et de solidarité à Quim Torra, interdit de toutes activités officielles pour un an. Président du parlement catalan et membre de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), Roger Torrent i Ramió a défendu les manifestants en affirmant que « brûler des portraits du roi était synonyme de liberté d’expression » même s’il a reconnu que lui-même ne le ferait pas. « Je ne me sens pas à l’aise ou brûler des photos, ou drapeaux, ou tout autre symbole [de l’Espagne] » a-t-il ajouté sur Radio 4. « Ce qui serait mieux pour la monarchie, c’est de réfléchir aux raisons pour lesquelles elle n’est pas la bienvenue en Catalogne », a poursuivi Roger Torrent i Ramió qui a affirmé que « c’était une institution corrompue et anachronique ». « Le roi devrait au moins s’excuser » a demandé le Président du parlement qui reproche à Felipe VI d’attiser la division en refusant de trouver une solution pacifique au conflit qui perdure entre Madrid et Barcelone. Le président de l’Associació de Municipis per la Independència (association des municipalités pour l’indépendance-AMI), Jordi Gaseni, a déclaré « que le roi Felipe VI ne représentait pas les Catalans car il était l'héritier d'une monarchie imposée par les coups, le sang et la force ». Le député ERC Ernest Maragall, petit-fils du célèbre poète, n’a pas hésité à qualifier le roi de « parasite obligé de se cacher quand il vient à Barcelone », rejoint par Podemos qui a posé la question de la pertinence de cette visite.
Des déclarations qui ont échaudé les mouvements monarchistes, déjà agacés par la remise en cause de l'institution monarchique par certains partis. Le leader du Parti Populaire, Pablo Casado a accusé son rival, Pedro Sanchez de se faire le complice de ces manifestations et d’avoir trahi le pays en « pardonnant aux putschistes ». Réunis à Perpignan, les anciens présidents catalans Artur Mas, Carles Puigdemont et Quim Torra ont dénoncé « cette Espagne qui réprime », allusion aux forces de polices (Mossos) qui sont intervenus pour disperser dans le calme les manifestants, et déclaré qu’ils entendaient continuer la lutte pour l’instauration de la république.
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