Podemos accuse la monarchie de génocide pour la conquête d'Al-Andalus

« En Al-Andalus, trois cultures coexistaient: musulmane, juive et chrétienne. C'est la monarchie hispanique de l’époque qui a envahi cet état et provoqué un génocide de sa population ». Lors de la session parlementaire du 2 février dernier, la députée Podemos de Séville, Isabel Franco, a surpris toute l’assemblée en accusant l’institution royale actuelle d’être l’héritière d’un régime monarchique qui a progressivement mis fin dans le sang à la domination musulmane sur l’Espagne. Des critiques inattendues de la part de la porte-parole de Podemos qui ont provoqué des cris d’indignation de la part des partis de l’opposition aux Cortès, des historiens et des médias en général et qui ont accusé Podemos de « révisionnisme historique ».

Le 2 février, lors d’une séance parlementaire la porte-parole de Podemos Isabel Franco, a accusé la monarchie qui existait en Espagne en 711 « d’invasion, de génocide et de dissimulation » pointant du doigt son actuelle héritière, celle des Bourbons. Une « Reconquista » (Reconquête) progressive du territoire espagnol qui s’est terminée en 1492 avec la conquête de Grenade par les souverains de Castille et d’Aragon. « En Al-Andalus, trois cultures coexistaient: musulmane, juive et chrétienne. C'est la monarchie hispanique de l’époque qui a envahi cet état et provoqué un génocide de sa population qu’elle a caché. Le peuple andalou a toujours été un exemple de multiculturalisme » a déclaré devant une assistance médusée celle qui est aussi députée de Séville.

Une intervention toutefois justifiée par la députée après les propos tenus par le député de Vox, Rocio Meer, qui avait affirmé quelques minutes auparavant que sa formation politique « ne tolérerait pas l'islamisation de l'Espagne que (la coalition de Gauche) encourage avec sa politique multiculturelle teintée de fausse bonne volonté ». Rapidement après cette déclaration, la députée a très vite fait l’objet de critiques de la part des députés de l'opposition qui n'ont pas apprécié que la « podemista » lie étrangement l’histoire de deux monarchies aux antipodes l’une de l’autre. Selon des historiens consultés par le journal monarchiste « ABC », « Al-Andalus n'a rien à voir avec ce que la députée qualifie de « monarchie hispanique». « D’ailleurs, même Al-Andalus ne comporte pas une seule période de l'histoire espagnole, mais de nombreuses étapes dans sa construction et sa fin de vie » ont ajouté ces experts sur le sujet. « Les propos de la députée de Podemos sont un scandale et visent uniquement à décréditer notre monarchie » affirment-ils de concert accusant à leur tour Isabel Franco de « révisionnisme historique ». « D'une part, Al-Andalus s'est détruite de l’intérieur, donnant naissance aux Taifas, des petits royaumes indépendants comme ceux de Grenade. D'autre part, ce sont les musulmans eux-mêmes qui ont mis fin au califat en tant qu'entité politique au cours du XIème siècle » rappelle les historiens qui balayent là les arguments d’Isabel Franco. Et s’ils reconnaissent volontiers que les monarques catholiques ont été les initiateurs de la reconquête de l'Espagne, « il est faux d’affirmer qu’ils auraient mis fin à Al-Andalus encore moins fait un génocide ». Pour les experts, ces déclarations sont une « folie sans fondement historique ».

En avril 2019, la mosquée Ishbilia de Séville avait publié sur Facebook un message rédigé au nom de la Communauté islamique et exigé des excuses du roi Felipe VI affirmant que « le moment historique était venu de reconnaître la culpabilité des vilenies, spoliations, déportations et assassinats commis sur ordre des Rois catholiques et de leurs collaborateurs les plus directs (…) envers la communauté musulmane ». Sur les réseaux sociaux, les internautes ont tiré à boulets rouges contre les élucubrations de la députée traitée d’analphabète ou pointant du doigt son manichéisme historique qui fait des « castillans, des méchants et des musulmans, les gentils ». Quand d’autres ont rappelé que les descendants des Omeyyades, Almoravides et autres Almohades réduisaient les chrétiens en esclavage ou plus récemment que l’Etat islamique s’était revendiqué d’Al-Andalus afin de commettre ses attentats sur le sol du royaume d’Espagne. Une guerre de mémoire qui a profondément agacé la presse espagnole et qui a unanimement condamné l’intervention « parfaitement inutile et gratuite » d’Isabel Franco contre la monarchie espagnole alors que celle-ci n'a eu de cesse de mettre en valeur tout le patrimoine d'Al-Andalus au cours des siècles qui se sont succédés.