La Russie, les Orléans et Jeanne d’Arc

«?Renouons les liens entre la France et la Russie». Invités par l’ambassade de Russie, qui semble porter un intérêt de plus en plus croissant pour le chef de la Maison royale de France, le comte et la comtesse de Paris, Jean et Philoména d’Orléans, ont assisté le 8 juillet à l’inauguration de la statue de Jeanne d’Arc, devant la cathédrale orthodoxe Sainte-Trinité, aux côtés de l’Association des amis de Jeanne d’Arc.

«Pendant longtemps les «faiseurs d’opinion» n’ont eu d’yeux que pour Pékin. J’ai toujours tendance à regarder dans une autre direction que celles qu’ils indiquent. Il faudra compter avec la Russie, qui reste un grand pays».  Le prince Jean d’Orléans, comte de Paris, Chef de la maison royale de France pour ses partisans, est l’objet de toutes les attentions russes. Son diner avec l’ambassadeur de Russie, Alexeï Mechkov, le 17 juin dernier, n’est pas passé inaperçu. Depuis peu de temps, Moscou semble porter un intérêt croissant pour le descendant du roi des Français, Louis-Philippe Ier. «L'occasion de renforcer nos liens historiques et célébrer l'amitié franco-russe !» avait écrit le comte de Paris à cette occasion  et qui a du se souvenir des liens de proximité entretenus par le duc d’Orléans, son aïeul, avec le Tsar Alexandre Ier. Un empereur qui songea même à mettre le fils de Philippe Egalité sur le trône de Louis XVI en 1814, le jugeant plus apte à diriger le pays que ces «Bourbons incapables de s‘accorder à l’esprit du temps et d’échapper à l’influence des d’émigrés aigris et rancuneux ».

«Moscou a mis en place tous les instruments nécessaires pour retrouver son rang dans le concert des nations. La France serait bien inspirée d’en faire de même» analysait, il y a peu encore,  le comte de Paris qui s’est attardé à discuter avec toutes les personnes présentes, invitées également à l’inauguration de la statue de Jeanne d’Arc, placée devant le Centre spirituel et culturel orthodoxe russe de la capitale française. «Je n’ignore pas qu’on accuse [le Président] Poutine de restaurer le vieil autoritarisme tsariste. Je crois surtout qu’il a choisi de rétablir l’ordre en renouant avec un passé dont les communistes prétendaient faire table rase. Poutine tente de réenraciner la Russie dans une histoire séculaire» affirme le prince Jean d’Orléans qui regrette également les malheurs engendrés par la révolution française. «La révolution française a plongé le pays dans les guerres civiles incessantes en dissolvant les communautés naturelles que préservait la monarchie : la famille, la paroisse les métiers, la province. (…), C’est une leçon que nous devrions méditer» affirme le comte de Paris qui a multiplié depuis «son avènement» les rencontres diplomatiques comme le rappelle le site officiel de la maison d'Orléans, «La Couronne». Italie et Japon au menu d’entrée, le plat principal de ces va et vient diplomatiques du prétendant à la couronne de France le mène désormais dans les salons feutrés de l’ambassade de Russie.  Moscou préférait-il avoir pour interlocuteur privilégié un capétien en lieu et place du président de la République Française, Emmanuel Macron, avec lequel il entretient des relations compliquées ?  C’est toute la question qui peut se poser aujourd’hui. « La diplomatie a précisément été inventée pour éviter que les pays se livrent à une guerre perpétuelle » explique le prince Jean qui entend jouer le rôle qui a toujours été dévolu à sa famille.

Les premières relations entre la France et la Russie datent du XIème siècle. Le mariage du roi Henri Ier avec la princesse Anne de Kiev sera le début d’une longue noce d’amour entre les deux pays que la révolution française va fracasser de plein fouet. Temporairement. La langue française est la langue privilégiée à Saint-Pétersbourg et les Romanov vont défiler à Paris tout au long des siècles. La monarchie de Juillet, tout au long de son règne, va s’employer à ménager la Russie tsariste, notamment sur la question de l’Orient qui agite la fin du XIXème siècle. A cette époque, Paris pense que le Tsar Nicolas Ier va tomber et dans la capitale russe, on juge la situation française de «calamiteuse», critiquant sévèrement les complots organisés par les fidèles de la monarchie Bourbon, tombée en 1830.  Le comte de Paris a les yeux tournés vers l’Est et plaide pour un renforcement des liens avec les anciens pays du bloc soviétique comme il l’expliquait dans son livre « Un prince français », paru en 2004. Rien d’étonnant à ce que le Chef de la maison royale de France ait été invité à l’inauguration de la statue de la sainte pour laquelle les Russes confessent une vraie fascination, surtout concernant côté mystique de la Pucelle et dans lequel ils se retrouvent. «Devenue un symbole de l'héroïsme national, la figure de Jeanne d'Arc incarne ce esprit de liberté, a toujours été celui peuple russe,qui au cours des siècles a été contraint à plusieurs reprises de prendre les armes afin de protéger notre patrie » a déclaré au cours de son allocution, devant l’œuvre de Boris Lejeune,  l’ambassadeur russe.

Prétendant au trône de France, Jean d’Orléans n’est pas le seul à s’intéresser à la Russie. Dans la Légitimité, on s’affaire aussi à placer le prince Louis-Alphonse de Bourbon auprès du Kremlin. Les deux princes connaissent l’héritier au trône de Russie, le Grand-duc Georges Romanov, plus proche de l’Orléans que du Bourbon. Toutefois sous les auspices de l’omniprésent colonel Jacques Hogard, qui jouit d’un réseau précieux au sein des milieux orthodoxes, le prince Louis-Alphonse de Bourbon a été invité par deux fois à s’exprimer au Congrès des Familles, la messe par excellent des forces conservatrices d’Europe et d’ailleurs, que finance allégrement des lobbys russes comme celui de Konstantin Malofeev, un oligarque proche du Président Vladimir Poutine. En 2017, le duc d’Anjou avait été l’invité d’une exposition consacrée en hommage à Saint Louis, organisée à Moscou. «La Russie gagne(rait) avec l’Europe de l’Ouest et l’Europe de l’Ouest gagnerait avec la Russie» avait alors déclaré lors d’une interview accordée à Stratpol, un Centre d’analyses politico-stratégiques.

La spiritualité reste l’essence même de la monarchie Capétienne. Jean d’Orléans ne cache pas sa proximité avec les différentes composantes de la religion chrétienne. Il entend fédérer les français sous l’œil du Christ tout en laissant le choix du culte à ses compatriotes. Lors de sa visite au sein du Centre spirituel et culturel orthodoxe russe, lui et son épouse ont prêté la plus grande attention aux explications du prêtre qui a joué les guides à cette occasion. Une visite qui a clôturé l’inauguration de la statue de Jeanne d’Arc. Fort à parier que cette invitation en appellera à une autre qui donnera certainement au comte de Paris, Jean d’Orléans, une stature internationale et une visibilité politique parmi les français. Jean d’Orléans, candidat à la présidentielle 2022 et sous le regard de la Sainte ? Les royalistes le fantasment déjà !  

Copyright@Frederic de Natal