« Mon nom appartient à la France et à chaque français ». Depuis plusieurs heures, le prince Jean-Christophe enchaîne les entretiens. Présent parmi une myriade de princes, princesses, ducs et duchesses, historiens, officiers de l’armée ou élèves de l’école militaire de Saint-Cyr, le prétendant au trône impérial de France est venu rendre hommage à l’Empereur Napoléon Ier dont les restes reposent au cœur même de l’Hôtel national des Invalides. Si le descendant du roi Jérôme, roi de Westphalie, s’est tenu loin de toutes polémiques, il a tenu à clarifier sa position lors d’une interview accordée au quotidien « Corse Matin ».
« Commémorer un personnage historique comme Napoléon, c'est célébrer notre peuple dans sa continuité et les différents moments de son existence. C'est célébrer notre histoire et rendre honneur à ce que nous sommes. Ne pas commémorer serait effacer notre histoire et renier ce que nous sommes ». Arrivé fraîchement de Londres où il réside à l’année, le prince Jean-Christophe ne sait plus où donner de la tête. Pris d’assaut par les journalistes, le prétendant au trône impérial est venu commémorer le bicentenaire de la mort de Napoléon Ier. Un « Petit caporal » entré dans la légende de notre roman national et dont la figure rassemble comme elle divise. Loin de toutes polémiques provoquées par des associations indigénistes qui accusent l’empereur des français d’avoir sciemment rétabli l’esclavage, le prince Napoléon préfère s’accentuer sur le legs d’un homme dont il porte fièrement le nom comme il l’explique au quotidien « Corse Matin ».
« Napoléon a évidemment commis des fautes, il ne s'agit pas de le nier. Il ne s'agit pas non plus de les justifier, mais on peut tenter de les expliquer par des circonstances et par des morales et normes de l'époque qui étaient bien différentes des nôtres aujourd'hui ». A la même question posée par différents magazines, l’arrière-petit-neveu de l’Aigle, dont les serres ont transformé profondément le visage de l’Europe, ne se dérobe pas. Il assume les erreurs de l’Empereur mais rappelle aussi « queles circonstances, les morales et normes de l'époque étaient bien différentes des nôtres aujourd'hui ». « L'héritage et les apports de cet homme ne peuvent être réduits à ces pages sombres sorties de leur contexte de l'époque » renchérit le prétendant au trône qui regrette toutefois que les médias n’aient pas assez défendu la mémoire du premier personnage préféré des français, une presse marquée par un « certain manque de courage ».
« Cette commémoration du bicentenaire est une page importante de notre histoire et doit être un moment de rassemblement et surtout de fierté nationale pour les Français, qui d'ailleurs en ont peut-être besoin pendant cette période difficile » affirme le prince Jean-Christophe Napoléon qui égrène, un à un, tous les progrès et réformes sociales mises en place par son illustre parent. La cérémonie du bicentenaire de sa mort « représente la continuité, la diversité et la richesse de notre histoire nationale » poursuit-il. Hier, l’Hôtel national des Invalides fondé par le roi Louis XIV, dont il est également un descendant, a été l’objet d’un ballet chamarré. Le temps d’une journée, la France a renoué avec ses fastes impériaux. Reconstitution d’époque, le prince a salué l’Empereur des français devant son imposant tombeau entouré par des élèves de l’école de Saint-Cyr.
Commémorer ou célébrer telle a été aussi la question pour ce 5 mai et qui a longtemps embarrassé le palais de l’Elysée, associé à cet événement historique. Pour Emmanuel Macron, président de la République, Napoléon est un « être complexe » mais aussi un « génie qui est aussi une part de nous ». « La vie de Napoléon est d’abord une ode à la volonté politique, à ceux qui jugent les destins figés, les existences écrites à l’avance. Le parcours de l’enfant d’Ajaccio, devenu maître de l’Europe, démontre clairement qu’un homme peut changer le cours de l’Histoire » déclare le chef de l’état qui a reconnu que le rétablissement de l’esclavage par Napoléon avait été « une faute, une trahison de l'esprit des Lumières ». « L'œuvre totale de Napoléon tout en clair-obscur n'a pas encore livré tous ses secrets, mais elle continue de nous forger. Son ultime intuition fut de vouloir combler le vide laissé par le roi le 21 janvier » n’a pas hésité à ajouter l’occupant de l’Elysée qui est souvent comparé à Napoléon. Ce qui agace quelque peu le prince Napoléon comme il l’a sous-entendu lors d’une interview dans l’émission « C à vous ». « Je pense qu’il y a certains points communs, en particulier sa jeunesse Mais ensuite je ne crois pas qu’il y ait beaucoup plus » avait lâché lapidairement le prétendant au trône.
Dans la cour d’honneur de l’Hôtel national des Invalides, on se presse autour du prince et son épouse. Mais aussi du comte et de la comtesse de Paris, Jean et Philoména d’Orléans, affairés à discuter avec les notables de Paris et officiers de l’armée qui se sont précipités pour le saluer. Le Chef de la Maison royale de France était invité comme descendant du roi Louis-Philippe, le dernier roi des français qui a permis en 1840 le retour du corps de Napoléon . Etrange rencontre entre deux prétendants au trône qui rient ensemble et discutent dans un esprit de réconciliation. Deux institutions monarchiques différentes qui se font face, l’alliance du Lys et des Abeilles, sous le regard des membres de la Maison royale Murat venus en nombre pour assister à cette cérémonie fastueuse qui a rassemblé les nostalgiques d’un passé glorieux. Et si on pouvait apercevoir des princes et princesses de Savoie, Wurtemberg ou de Luxembourg autour des prétendants au trône, également salué par Valérie Pécresse, Présidente de la région île de France ou encore Christian Estrosi, maire de Nice, la journée est restée impériale.
« J'ai toujours été fier d'avoir l'honneur de porter ce nom et d'être témoin du passé de ma famille et de son rôle dans l'histoire. Mais surtout sans vivre dans l'illusion ni le passé, je suis un homme de mon temps, résolument tourné vers l'avenir de mon pays, et de ma famille. J'ai toujours voulu me construire par moi-même, devenir indépendant, acquérir mon mérite par le travail et surtout pas grâce à mon nom. Pour moi, Napoléon incarne l'idée de progrès, l'élan (…). J'ai la ferme intention de poursuivre dans ce sens cet héritage ». Le prince nourrit-il des ambitions politiques ? « Je souhaite préserver la mémoire de ma famille, promouvoir ses apports et entretenir l'esprit d'engagement au service de la France qui a toujours guidé son action. Je représente ma famille dans des cérémonies et célébrations en France et à l'étranger, et souhaite contribuer à la promotion de notre patrimoine historique et culturel dans le monde » explique le prince Napoléon VII.
« Je me suis toujours beaucoup intéressé à la politique, je crains même que ce soit un peu génétique ! Et je suis de très près l'actualité et la politique française. Ma volonté d'engagement au service de la France est toujours forte. Cependant, je pense que l'on peut œuvrer pour son pays et prendre des responsabilités publiques sous plusieurs formes, et sans forcément se présenter à une élection. Je ne tiens pas à jouer de rôle auprès de tel ou tel parti » déclare le prince impérial. La veille des cérémonies, la mouvance bonapartiste a annoncé la renaissance de l’Appel au Peuple, un parti qui a connu ses heures de gloires durant l’Entre-deux-guerres et compté de nombreux élus au sein du Parlement parmi lesquels les princes Murat. Des princes dont l’actuel descendant n’exclut pas de « mouiller le chemise » si le besoin de la France s’en fait sentir. « Je sers mais je ne prétends pas » rappelle quant à lui et simplement Jean-Christophe Napoléon.
Copyright@Frederic de Natal