Les Habsbourg-Lorraine comptent un troisième ambassadeur
Les Habsbourg-Lorraine comptent un troisième ambassadeur
La maison impériale des Habsbourg-Lorraine compte un nouvel ambassadeur. Prétendant au trône du Grand-duché de Toscane, l’archiduc Sigismond de Habsbourg-Toscane a été nommé Ambassadeur de l’Ordre de Malte dans la république d’Uruguay.
« Austriae est imperare orbi universo » (Il appartient à l'Autriche de régner sur tout l’univers) est la devise de la maison d'Autriche, adoptée par l'empereur Frédéric III au cours du XVe siècle. Elle a régné sur un vaste empire qui est tombé à la fin de la Première Guerre mondiale, en novembre 1918. Parmi les états qu’elle a dirigé sous le regard de son aigle bicéphale, celui la très italienne Toscane avec pour capitale, la célèbre ville de Florence.
Des Médicis aux Habsbourg, un pouvoir convoité
L’histoire de cette région réputée pour son patrimoine se mélange avant tout avec celle des Médicis qui vont régner quasiment sans interruption de 1434 à 1743. Symbole par excellence du siècle « Rinascimento », cette dynastie patricienne de banquiers va marquer de son sceau l’Europe de la Renaissance, tant dans le mécénat, les arts que la politique. Seigneurs de Florence, qui tenait plus de la monarchie que de la république dont elle portait le nom, ils donneront deux papes au Vatican et marient leurs filles avec les plus belles familles royales de l’époque. La France n’échappera pas à cette toile tissée par cette famille influente à qui elle donnera deux reines, Catherine et Marie de Médicis. C’est enfin au XVIème siècle que qu’ils obtiendront le titre prestigieux de duc. Alexandre le Maure, enfant illégitime de Laurent II et d’une servante mulâtre, va donner aux Médicis tout ce caractère princier qui les caractérise depuis des générations. Pour autant, elle n’échappe pas à ses vices. Sa mort, sur laquelle plane encore l’ombre du moine Savonarole mis au bûcher (1498), pourfendeur de cette illustre famille, sera à l’image de ces Médicis : tout dans la violence et le romanesque sulfureux. Le 6 janvier 1537, il est assassiné par Lorenzino de Médicis qui n’est autre que son cousin. Et son amant avec qui il partage la couche.
La faction républicaine de Florence n’aura pas le temps d’exploiter ce meurtre dont elle a été à l’origine. Les Palleschis s’empressent de mettre sur le trône, Cosme Ier, un cadet que nul ne connaissait. L’histoire monarchique de la Toscane (il est nommé alors Grand-duc) et celle des Médicis va brutalement s’arrêter avec le règne de Jean-Gaston. Monté sur le trône en 1723, ce débauché qui se laisse gouverner par ses amants et ses mignons n’aura pas de descendance en dépit d’un mariage qui ne l’intéresse guère. Alcoolique notoire, il se laisse manipuler par la France qui récupère ses droits au trône dans un tour de passe-passe royal. En échange de la Lorraine, le duc François III Etienne récupère la Toscane et cède son duché au roi de Pologne détrôné, Stanislas Leszczynski, beau-père du roi de France.
Une maison victime du Risorgimento
Et voici comment les Habsbourg-Lorraine devinrent les nouveaux souverains de cet état italien sans que les Toscans n’aient eu leur mot à dire. L’Archiduc Sigismond de Habsbourg-Lorraine a aujourd’hui 58 ans. Il a suivi la tradition des Médicis, c’est un banquier qui a passé sa jeunesse en Uruguay où sa famille s’était installée en 1951, un catholique convaincu. Il porte en lui l’héritage de cinq Grands-ducs de Toscane qui ont traversé les siècles et les affres de ceux-ci. Parmi lesquels, la révolution française ou l’empire de Napoléon qui placera sa sœur Elisa à la tête du gouvernement général des départements de Toscane entre 1809 et 1814. Monarchie absolue devenue parlementaire en 1848, le Grand-duché sombre dans l’anarchie, connaîtra sa révolution, et même une éphémère république …dictatoriale. L’Autriche intervient militairement, restaure l’institution royale pour une décennie, au prix de l’abdication de son souverain. Le 21 juillet 1859, Ferdinand IV (1835-1908) succède à son père.
Un règne qui commence sous de mauvais auspices, mis sous pression par la maison de Savoie qui ne cache pas sa volonté de réaliser l’unité de toute la botte de l’Europe avec l’aide de la France. Pis, le nouveau souverain n’arrive pas à regagner son trône alors qu’il est en Autriche depuis la révolution. L’homme fort en Toscane est le Baron (« de fer ») Bettino Ricasoli qui est favorable au Risorgimento. Tout joue contre le Grand-duc Ferdinand IV qui est finalement déposé en mars 1860, la Toscane annexée par les Savoie qui s’emparent de la seconde possession autrichienne en Italie après la Lombardie-Vénétie. Un exil définitif qui sera marqué par quelques scandales notoires alimentés par sa progéniture. Certains historiens avancent même que Ferdinand IV aurait transmis ses droits à la branche aînée des Habsbourg-Lorraine, faisant perdre à ses successeurs tout droit à la couronne toscane.
Un retour remarqué et un mouvement de soutien qui peine à percer
C’est dans les années 1980 que la famille grand-ducale fera son retour. L’archiduc Léopold III (1942-2021), le père de l'actuel Grand-duc, est reçu en grande pompe à Florence le 16 mars 1985 par le président de la région, Gianfranco Bartoloni. La ville se couvre de drapeaux horizontaux aux couleurs rouges blanches rouges, la foule rassemblée cria d’une seule voix : « Viva il granducato » (vive le Grand-duché). Un succès qui sera suivi par des manifestations honorant le Grand-duc et sa famille jusqu’à la fin de l’année suivante. Mais peu exploitées par la maison grand-ducale. En 1993, Léopold III décide d’abdiquer en faveur de son fils Sigismond après son second mariage civil. Place à la nouvelle génération. Du moins officiellement, car officieusement, c’est l’archiduc Otto de Habsbourg-Lorraine, alors chef de la maison impériale d’Autriche qui lui rappellera les règles dynastiques auxquelles il est soumis de par sa naissance et son nom.
À cette dynastie sortie des pages jaunies de l’histoire tumultueuse de l’Italie, manque un parti pour la soutenir. Ce sera chose faîte le 13 novembre 2000. Porté sur les fonts baptismaux par Luigi Cartei, le mouvement Toscana Granducale tente rapidement l’aventure politique. Ce proche du Vatican souhaite le rétablissement de la famille grand-ducale des Habsbourg-Toscane au sein d’une vaste confédération d’états autonomes dans une Italie indépendante. Mais les résultats ne sont pas à la hauteur de ses espérances. Participant régulièrement aux élections régionales et municipales en son nom propre ou allié de circonstance comme avec Forza Italia (2013), Toscana Granducale n’arrive pas à dépasser les 5 % de votes. Bien peu pour convaincre de la nécessité de restaurer ce trône en dépit d’une certaine nostalgie palpable. Le mouvement a fini par cesser ses activités, son site officiel fermé.
Un Habbsourg fier de son histoire
Quel regard porte alors celui qui est Sigismond Ier pour ses partisans concernant l’éventualité d’un retour de la monarchie grand-ducale ? Aucun ! Le Grand-duc se veut réaliste, comme il l’indiquait lors d’une interview au quotidien Il Tirreno en 2014, assume certes ses prétentions et visite parfois cet état dont il est l’héritier, mais dont il parle peu la langue. Reconnu, quelques mains serrées aux nostalgiques présents, il porte néanmoins son combat ailleurs. Celui de la reconnaissance de sa titulature au sein de la maison impériale, le soutien à la construction d l’Europe dont il est un défenseur et la gestion de son patrimoine en Amérique du Sud.
Très curieusement, les Habsbourg-Lorraine, alors au pouvoir à Vienne, ont toujours considéré cette branche comme de simples gouverneurs de l’état toscan. Plus autrichiens qu’italiens, les Habsourg-Toscane s’étaient d’ailleurs engagés sous l’uniforme austro-hongrois durant la Première Guerre mondiale. Pas plus l’archiduc Otto de Habsbourg-Lorraine que son fils Karl ne reconnaissent le titre que porte leur cousin. Une famille qui est entourée autant de mystères qu’elle avait profondément agacé l’archiduc Otto de son vivant avec ses prétentions carlistes en Espagne. Pour le Grand-duc Sigismond, sa maison est aussi équivalente en rang que celle de Vienne. Et de réclamer au prétendant au trône austro-hongrois afin qu’il scinde en deux entités distinctes l’une de l’autre, ces deux branches la maison impériale. Jusqu’ici, l’archiduc Karl a toujours refusé de céder aux injonctions du Grand-duc.
Père de trois enfants [Léopold [23 ans] Tatiana [22 ans] et Maximilien [21 ans]), l’archiduc Sigismond de Habsbourg-Lorraine a été nommé Ambassadeur de l’ordre de Malte en Uruguay où il réside. Engagé dans le caritatif, il est désormais le troisième diplomate au sein de la maison impériale après les archiducs Édouard et Georg de Habsbourg de Lorraine, respectivement en poste au Vatican et en France pour la Hongrie.