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Aimone de Savoie Aoste

 «Je voulais les emmener à Turin, la première capitale de l'Italie pour la maison de Savoie: Umberto m'a demandé de dessiner un arbre généalogique de notre famille et je lui ai promis que nous le ferions cet été, dans les Pouilles » 

En marge de sa visite au palais royal de Turin, accompagné de ses enfants, l’héritier au trône d’Italie, le prince Aymone de Savoie-Aoste a accordé une interview* surprenante au journal bien connu du Corriere della Sera. Né en 1967, cousin direct du prince Jean d’Orléans, comte de Paris, il a épousé la princesse Olga de Grèce avec qui il a eu 3 enfants, Umberto (10 ans), Amedeo (8 ans) et Isabella  (7 ans).

Il est soutenu dans ses droits au trône d’Italie par l’Union monarchique italienne qui compte 70 000 adhérents et qui a des élus à l’assemblée nationale. Selon un récent sondage, 15% des italiens se déclarent en faveur de la monarchie.

Créée en 1845, la maison d’Aoste a donné un roi à l’Espagne (Amédée Ier de 1870 à 1873), un vice –roi d’Ethiopie (Amédée de 1937 à 1941) et un roi de Croatie (Aymone de 1941 à 1943). Amédée III (né en 1943) est l’actuel duc de Savoie-Aoste, prétendant à la couronne royale d’Italie contre son cousin, le prince Victor-Emmanuel, petit-fils du roi Humbert II. Une querelle dynastique qui divise les monarchistes depuis 2006.

65Corriere : Quelle sorte d’éducation donnez-vous à vos enfants aujourd'hui ? 

Prince Aymone : Je leur apprends qu’il y’a une histoire de famille avec des principes à respecter. Je ne leur cache pas qu’ils devront trouver du travail plus tard. Nous avons peu de ressources pour vivre et, même si nous en avions plus que de raison, un prince ne doit  pas s’arrêter de travailler  pour autant au motif qu’il est privilégié par son rang et sa fortune. 


 

Corriere : Vous travaillez en Russie depuis que vous avez quitté vos fonctions au sein de la société Rinascente de Milan ?

Prince Aymone : J’ai effectivement passé une partie de ma vie à Milan. D’abord comme étudiant à l’université de Bocconi [spécialisée dans les sciences économiques, la finance, les sciences politiques, le management, l'administration publique et le droit-ndlr], puis j'ai fait un stage à la maison de Couture Rinascente  Mon fils Umberto, lui-même a également fait un d'école à Milan, à San Carlo. J’ai ensuite déménagé à Moscou dans les années 1990  après un passage à la JP Morgan de Londres.

Corriere : Travailler en Russie est-il vraiment si dangereux ? 

Prince Aymone : Oui, c’est un véritable un Far West ! J'ai connu des entrepreneurs assassinés pour rien. Il faut dire que c’est aussi stressant qu’intéressant. Papa ne voulait pas me laisser partir à l’époque. Maintenant, je crois qu’il m’a pardonné mon déménagement en  Russie.
 

Corriere : Aujourd'hui, vous êtes à la tête de Pirelli Tyres en Russie dont la zone d’action couvre toute l'ancienne zone soviétique et les pays nordiques: soit 3 500 personnes sous votre direction et deux usines.  Ne souhaitez –vous pas revenir ?

Prince Aymone : Je suis retourné deux fois en Italie, mais mon destin professionnel est évidemment à Moscou. 
 

Corriere : Et comment expliquez-vous le succès du (Président) Poutine (qui lui a décerné l'Ordre de l'amitié en 2018-ndlr)? Mais aussi la crainte de l'Union européenne de le voir de s'immiscer dans les élections européennes.


98Prince Aymone : Lorsqu’il a succédé au président (Boris) Eltsine,  (Vladimir) Poutine a présenté sa vision politique d’un pays qui reste complexe par nature. Il y a tant à faire pour tout changer. Il faut reconnaître que les Russes sont des entrepreneurs qui restent qualifiés, mais moins bons en affaires. Il est dans l’intérêt des Italiens, avec des entrepreneurs comme  Pirelli, Agnelli ou Olivetti, de travailler avec Moscou. 

De quelle ingérence parlons-nous d’ailleurs ? Le ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a clarifié ses accusations de cette manière: « Si Moscou est considérée comme une puissance internationale, comment peut-elle  donc s’immiscer dans les États-Unis ou de l'Europe ? ».

Corriere : Le mystère des derniers Romanov a été résolu avec l’ADN du prince Philipp, époux d’Elizabeth II. Que pensez-vous de cette évolution de l’histoire ?


Prince Aymone : Ils auraient tout aussi bien pu nous demander puisque nous sommes nous-mêmes liés aux derniers tsars. Quand je suis arrivé en 1992, Nicolas II  était décrit encore, dans les livres, comme « le sanguinaire ». Aujourd’hui il est adulé comme un saint.  Il faut savoir étudier l'histoire dans toute sa  perspective. Je un rêve de voir un jour une nouvelle statue être élevée en hommage au roi Charles –Albert [roi de 1831 à 1849 qui a introduit la monarchie constitutionnelle-ndlr] ou que l’on rende hommage au roi Umberto II [roi de mai à juin 1946]  que l’on a envoyé en exil.

Corriere : Y a-t-il un espoir de retour de la monarchie ? Il y a aussi cette étrange prophétie liée à Padre Pio , qu’en pensez-vous ?


Prince Aymone : Non, je ne crois pas que la monarchie va revenir en Italie. Je n’ai d’ailleurs pas hésité à prêter allégeance à la République, au Palais Morosini, à Venise, afin de pouvoir intégrer l’Académie navale. Quant à la « prophétie » qui dit plus ou moins qu’un Savoie va revenir et remonter sur le trône, quand je me suis agenouillé devant la tombe du Saint, je lui ai demandé pardon pour ce bas-relief qui me dépeint dans la crypte de Padre Pio. J'ai rencontré l'auteur de cette sculpture quand j'étais enfant et il m’a avoué qu'il avait souhaité me représenter. Qui aurait pu l'imaginer ... !

Corriere : La maison de Savoie est toujours très divisée. Encore plus depuis le retour des restes du roi Victor Emmanuel III au couvent de Vicoforte, à l'initiative de la princesse Maria Gabriella.


Prince Aymone : Oui, il était normal de rapatrier les corps du roi et de la reine Elena [décembre 2017-ndlr]. Mais je reconnais que leur place est au Panthéon. Mon père a d’ailleurs tenté de ramener le corps du duc des Abruzzes [l’explorateur et prince Louis-Amédée de Savoie-ndlr] enterré en Somalie, mais le tombeau a été malheureusement profané et détruit

Corriere : C'est aussi le souhait du prince Emmanuel-Philibert, fils de du prince Victor-Emmanuel de voir le corps du roi au Panthéon. Les relations entre vous deux sont-elles toujours autant tendues ? 


Prince Aymone : Je dois préparer l’avenir de mes enfants Umberto, Amedeo et Isabella ...  et celui-ci ne peut se faire sans (mon cousin-ndlr) Emmanuel Philibert. Après que nos deux familles se sont disputées durant des années, nous pourrions peut-être nous enfin rapprocher !?

Copyright@Frederic de Natal

*Cette interview a été traduite et adaptée à un lectorat francophone pour le rendre plus accessible vis-à-vis des subtilités de l’Italie. Photos /Corriere della Sera

https://www.corriere.it/cronache/19_aprile_01/aimone-savoia-la-mia-vita-savoia-parente-zar-russia-putin-6c1be63a-53d2-11e9-96c3-69d40ecc7f9b.shtml

 

(Paru le 04/04/2019)

Date de dernière mise à jour : 01/04/2020

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