« Nous avons grand espoir de retrouver notre vie d’avant ». La photo est saisissante, forte en symboles et inédite dans l’histoire de la monarchie constitutionnelle du « Kongeriket Norge ». Pour la première fois en trente ans, ce vendredi 2 octobre, c’est le prince héritier Haakon Magnus, nommé régent depuis la récente hospitalisation de son père, qui a ouvert le parlement sous le regard de sa mère, la reine Sonja Haraldsen.
Bien qu’il soit sorti de l’hôpital national d’Oslo depuis le 28 septembre, après y avoir été admis pour des troubles respiratoires, sans liens avec le coronavirus covid-19, le roi Harald V reste maintenu sous surveillance médicale encore tout ce week-end. A 83 ans, la santé du monarque est devenue un sujet récurrent dans le royaume viking. La succession au trône de Norvège est assurée. Lorsque son père rejoindra « le Valhalla afin de siéger au côté d’Odin et de Thor », ce sera son fils Haakon Magnus qui montera sur ce trône qu’occupe Harald V depuis 1991. Le prince héritier, âgé de 47 ans, a été nommé régent la semaine dernière et en l’absence de son père, il a dû ouvrir la 165ème session du Storting, le parlement norvégien, sous le regard de sa mère, la reine Sonja Haraldsen.
C’est inédit dans l’histoire de cette monarchie constitutionnelle. Le prince Haakon Magnus assis sur le trône de Norvège. Le pays a pris son indépendance de la Suède en 1905, sans violences. Le gouvernement a conservé sa forme monarchique et avait immédiatement proposé la couronne à un prince danois, le prince Christian. Une fois élu, il avait tenu à prendre le nom du dernier souverain à avoir régné sur un royaume indépendant, Haakon VII, afin de marquer la renaissance de la Norvège. C’est en hommage à son arrière-grand-père que le prince héritier a été baptisé du même nom. L’ouverture du parlement s’est faite dans des conditions inhabituelles en raison de la pandémie de covid-19. Seuls 200 des députés ont pu siéger sur les 750 élus, chacun séparé par des vitres en plexiglass. C’est la Première ministre conservatrice Erna Solberg qui a remis le discours au prince Haakon Magnus afin que celui-ci puisse le lire aux élus du royaume.
Les premières notes de l’hymne national «Oui, nous aimons ce pays » raisonnent dans le Storting. Derrière le « Norges Kronprins», le trône d’or orné du lion des Schleswig-Holstein-Sonderbourg-Glücksbourg, utilisé depuis le XIIIème siècle par les rois de Norvège. C’est d’ailleurs au roi Erik II Magnusson (1268-1299) que l’on doit le rajout de la hache courte et la couronne sur le blason du royaume. L'ouverture solennelle du Storting est régi selon des traditions remontant à 1814 :«Dès que le Storting est constitué, le roi ou la personne qu'il nomme, ouvre ses les débats par un discours dans lequel il l'informe de l'état du royaume et des conditions dans lesquelles il souhaite surtout attirer l'attention du Storting. Aucune délibération ne doit avoir lieu en présence du roi » précise l'article 74 de la Constitution.
« Depuis six mois, le coronavirus affecte notre quotidien. Le virus a pris des vies, contraint des entreprises à fermer et restreint nos libertés de mouvements » a déclaré le prince héritier au Storting. En dépit de ces temps compliqués, nous avons pu voir le meilleur de la Norvège. Ensemble, nous avons énormément accompli. Ensemble, nous avons persévéré et nous avons peu à peu retrouvé nos habitudes quotidiennes » a poursuivi le régent. qui a ajouté qu’un vaccin était actuellement en cours de production et que toute la population pourra être vaccinée dès le début de l’année prochaine. « Un fort taux d'emploi est la condition préalable à l’équilibre de la société norvégienne », a déclaré le prince héritier qui a demandé au gouvernement de mettre « l’accent sur les compétences et de renforcer les offres de formation » afin que les norvégiens ne souffrent pas des conséquences du covid-19. « Le chômage est encore trop élevé. Beaucoup sont encore incertains sur ce que l'avenir leur réserve. Le gouvernement doit surveille de près les industries les plus touchées. Il faut éviter que des emplois rentables soient perdus « a averti le prince héritier dans son discours centré sur le lien social et le bien-être de ses futurs sujets. « Nous avons grand espoir de retrouver notre vie d’avant » a conclu le « Norges Kronprins », désormais à quelques marches de son couronnement.
Selon un dernier sondage paru en mars 2020, 81% des norvégiens souhaitent conserver la monarchie au décès du roi Harald V. Différents députés, notamment issus de la gauche, ont déposé ces derniers jours un projet de loi visant à mettre fin à ce système institutionnel qu’ils estiment « peu démocratique et pas adapté à notre société moderne ». Le projet de loi a peu de de chances d’aboutir comme les précédents du même type qui ont été présentés lors de différentes session. 15% des norvégiens restent favorables à l'instauration d'une république.
Copyright@Frederic de Natal
Photos@ Heiko Junge