Prinsjesdag 2020 : La monarchie batave à la diète

C’est une journée attendue chaque année par les néerlandais, tous vêtus d’orange,  la couleur officielle de la dynastie royale des Nassau. Le Prinsjesdag (« Jour des petits princes ») est l’occasion pour la famille royale de traverser toutes les rues d’Amsterdam, jauger son taux de popularité et renforcer les liens de la monarchie avec ses sujets. Cette année, coronavirus oblige, les festivités ont été réduites. Le 15 septembre, dans une atmosphère de sobriété quasi religieuse, le roi Willem-Alexander a lu son discours annuel devant les députés et sénateurs convoqués au parlement, réunis pour l’occasion en Etats généraux.

« Je n'oublierai jamais le jour du Souvenir national, ce 4 mai 2020. C'était à la fois irréel et très réaliste. Cette place du Dam presque vide, le silence encore plus assourdissant que d'habitude, et la prise de conscience que la célébration de ces 75 ans de liberté avait acquis par nécessité un caractère modeste ». C’est par ces mots remplis d’émotion que le roi Willem–Alexander a commencé son discours. L’évènement a lieu tous les troisièmes mardi de septembre comme le stipule la Constitution qui régit le royaume. Entre 1814 et 1848, le contenu du discours était rédigé par le « Koning » (roi) lui-même avant que cette tâche ne soit transférée au Premier ministre. Il faudra attendre la fin de la Première guerre mondiale pour que le cérémonial prenne la forme qu’on lui connaît de nos jours puis en 1931 qu’il ne soit filmé.

Crise sanitaire oblige, pas de carrosses royaux dans les rues de La Haye,  remplacés par une simple voiture de luxe qui a conduit le couple royal vers le parlement. Les traditions ont dû laisser le champ libre aux règles de distanciation sociale imposée par les risques de Covid-19. Exit le Ridderzaal (la Salle des Chevaliers du Binnenhof) où se rassemble habituellement tout le corps représentatif politique et diplomatique pour écouter le «Troonrede» du souverain. A la place, une vaste salle aménagée où seuls deux trônes en or cassaient la froideur du lieu.  « Mon admiration et mes remerciements vont à tous ceux qui ont fait tout leur possible dans les milieux hospitaliers et ailleurs dans la société pour faire face à la crise du corona. Infirmières, personnel de la défense, employés des supermarchés et personnes travaillant dans les transports publics. Je tiens également à exprimer mon soutien comme mes condoléances à ceux qui ont été touchés par le coronavirus et qui ont perdu un être cher » a poursuivi le roi Willem-Alexander qui a appelé les néerlandais à continuer de faire preuve d’altruisme. « Pendant la crise du coronavirus, les Pays-Bas se sont montrés responsables, unis et inflexibles. Gardons cet état d’esprit aussi longtemps qu'il le faudra. Et tirons-en confiance pour l’avenir» s’est réjoui le prince sous le regard de son épouse, la reine Maxima.

Le souverain Nassau s’est longuement attardé sur les incertitudes (qui préoccupent les néerlandais) dans les domaines de l'éducation, du logement et du travail, regrettant que la crise sanitaire ait rendu moins urgent les problèmes environnementaux tels que le changement climatique (une taxe va être introduite par le parlement afin de réduire les émissions de CO2 à hauteur de 49%). Willem-Alexander a tenu à rassurer ses sujets. « Le gouvernement a choisi d'investir dans le maintien de l'emploi, de bonnes installations publiques, de mettre en place une structure économique plus forte afin de rendre notre pays tourné vers l’avenir. Les plans du gouvernement pour le futur reposent sur ces piliers » a affirmé le fils de la reine Beatrix.  « L'économie et les finances publiques néerlandaises résistent » face à la crise a martelé le roi qui a toutefois averti les néerlandais que le royaume n’échapperait pas à la récession comme ses «  principaux partenaires commerciaux en Europe ». Le roi  Willem–Alexander a tourné son discours vers Bruxelles, appelant chaque état européen à « travailler sur des réformes économiques structurelles à long terme ». « C'est une forme de solidarité qui fonctionne dans les deux sens: des voisins qui s'entraident naturellement en cas de besoin, mais qui prennent également des mesures et des réformes dans leur propre pays pour être mieux préparés à la prochaine crise » assure le souverain.

« L'état de droit est le bien public le plus important de la société. C'est la base d'un pays démocratique qui est socialement et économiquement fort et dans lequel l'équité est la norme». Willem-Alexander a décidé de s’attaquer au racisme ambiant dans son pays. « La couleur de la peau ou le nom d'une personne restent encore trop souvent des critères de sélections qui ne sont pas un facteur chance pour eux. C'est inacceptable. Le débat social à ce sujet est parfois irritant, mais il peut aussi nous amener plus loin dans la lutte contre la discrimination, le racisme et les inégalités de traitement. Combler les différences existantes commence par la volonté de s'écouter les uns les autres » a renchéri le roi batave qui a  multiplié , ces derniers temps, ses excuses pour les crimes perpétrés par son royaume durant l’époque coloniale. «L'unité et la responsabilité sont nécessaires. Chaque génération a aujourd'hui des préoccupations et des questions spécifiques. Mais c'est précisément dans le lien entre les générations que chacun, petits et grands, peut apporter sa contribution  afin de surmonter cette période difficile» a conclu très optimiste le roi Willem-Alexander.

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