« Selon les derniers sondages d'opinion publique, plus de 30% des personnes interrogées pensent qu'il serait préférable que le Portugal ait un roi ». Si la monarchie était restaurée au pays, il en serait le souverain. A 75 ans, Dom Duarte-Pio de Bragance est l'actuel prétendant à la couronne du Portugal. Très populaire, il fait régulièrement la couverture des magazines aux côtés de son épouse, Isabel de Herédia. Père de trois enfants, Afonso, Maria Francisca et Dinis, qui incarnent les valeurs et l'héritage d’une maison qui a dirigé cette nation d’explorateurs durant trois siècles, Dom Duarte-Pio est au service des portugais et tous les lusophones, menant une importante activité diplomatique avec les anciennes colonies de son pays comme au Timor oriental ou en Angola. Conservant des liens d’affection avec la famille royale d’Espagne, le duc de Bragance revient sur la gestion de la pandémie de coronavirus par le gouvernement, sa famille, ses années en Angola et les perspectives de retour de la monarchie au Portugal dans un entretien accordé au magazine Vanitatis.
« J’ai suivi avec inquiétude les conséquences liées à cette pandémie qui a causé tant de décès dans toutes les familles du Portugal. Si d’un point de vue sanitaire, tout a été géré correctement, je vois avec appréhension la détérioration de la situation économique qui va plonger des entreprises dans des situations difficiles et à laquelle même ma fondation [Dom Manuel II, du nom du dernier roi du Portugal entre 1908 et 1910-ndlr] ne va pas échapper. Une période comme celle-ci nous oblige à faire preuve d’un esprit plus chrétien, nous invite à la réflexion spirituelle et à plus de solidarité». Prétendant au trône du Portugal, Dom Duarte-Pio de Bragance garde les pieds sur terre et entend être au chevet de son peuple avec lequel il est connecté. « Les populations rurales représentent la véritable âme des Portugais, de chaque région d'où ils viennent, et elles maintiennent une bonne diversité culturelle, ce qui rend intéressant de connaître leurs différences. Nous sommes probablement la plus ancienne nation européenne aux frontières déterminées qui ont peu bougé » affirme Dom Duarte-Pio qui revendique pleinement ses origines. Dans ses veines coule le sang des rois explorateurs qui ont façonné les frontières d’un royaume qui a régné tant sur les terres que sur les mers. « Le Portugal a la chance de disposer de plusieurs institutions à caractère social qui fonctionnent très bien et contribuent de manière très importante à soutenir les personnes qui se trouvent dans une situation plus vulnérable » poursuit le prince qui appelle ses concitoyens à se retrouver dans les valeurs qui ont fait la base de la chrétienté ». Le Portugal est prêt à faire face aux conséquences de la pandémie semble résumer le prince.
Il est le père de trois enfants dont il est très fier . « Nos enfants ont été élevés afin de se rendre compte qu'en plus de leurs obligations normales envers Dieu et leur pays, ils ont des devoirs spéciaux en raison des responsabilités qui pèsent sur leurs épaules » explique le prince. « Afonso (24 ans), qui a terminé son cours de sciences politiques et relations internationales à l'Université catholique, effectue actuellement un stage à la Chambre de commerce luso-américaine. Il est également pompier au sein de l'Association royale des pompiers volontaires de Lisbonne dont il a suivi les cours et la formation avec assiduité ». Il a un frère, Dinis (21 ans) qui étudie dans une université belge. Quant à Maria Francisca (23 ans) sa sœur, « elle vient d’achever ses cours de communication à l'Université catholique et travaille en ce moment pour actuellement pour une société de publicité et de relations publiques » s’empresse de dire Dom Duarte qui précise « qu’elle envisage de débuter une carrière de journaliste et s’investir pour le Timor Oriental.
Héritier au trône, Dom Afonso est célibataire. Son caractère présente beaucoup de similitudes avec son père. « Afonso a beaucoup aimé son expérience militaire et reste très intéressé par la nature, y compris la pêche et la chasse, avec un profond respect pour l'écologie. Ces intérêts que je partage également, même si je n'ai jamais chassé sérieusement » s’amuse Dom Duarte qui s’attarde sur sa jeunesse. « J'ai vraiment apprécié la période de cinq ans pendant laquelle j'étais pilote dans l'armée de l'air portugaise, servant dans notre province portugaise d'Angola dans la lutte contre le terrorisme ». Le duc de Bragance a alors découvert une colonie sous la férule des milieux conservateurs et un régime de ségrégation raciale. « Les forces de défense portugaises présentes sur ce territoire étaient majoritairement constituées d'Angolais et nous combattions alors trois mouvements armés: le MPLA, soutenu par l'Union soviétique; UNITA, soutenu par la Chine, et le FNLA (Front National pour la Libération de l'Angola), financé par des institutions nord-américaines. Mon rôle en tant que pilote-officier de l'armée de l'air portugaise était de fournir un soutien pour le transport et l'évacuation des blessés. Ma spécialité était le pilotage d'hélicoptère. A cette époque, je me suis fait beaucoup d'amis dans tous les cercles sociaux angolais » se rappelle Dom Duarte-Pio. Et autant d’ennemis parmi les colons. « J'ai contribué à mettre fin au conflit entre l'Angola et l'ancien protectorat portugais de Cabinda. Lorsque le gouvernement révolutionnaire portugais en 1975 a donné l'indépendance à l'Angola, il avait inclus le Cabinda. Idem pour le Timor, proche des îles indonésiennes, qui a rejoint le Portugal en 1515, à l'initiative des rois du Timor, qui l'ont officialisé par accord avec notre pays. J’ai utilisé les mêmes techniques pour réconcilier les deux parties [le Timor est devenu indépendant en 2002 -ndlr] explique le prince qui a démontré plus d’une fois ses talents de diplomate, y compris en Syrie. « L'un de mes objectifs est de renforcer ce lien fraternel entre les pays qui ont coexisté avec nous pendant des siècles avec le statut de territoires d'outre-mer, dont les populations avaient la nationalité portugaise et qui constituent aujourd'hui la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP) » révèle le prétendant au trône qui songe à la mise en place d’un Commonwealth à la portugaise
C’est d’ailleurs dans cette partie de l’Afrique de l’Est qu’il a rencontré Isabel de Herédia avec qui il a fêté son 25ème anniversaire de mariage. « Nous étions des amis. Un jour, lorsque nous sommes allés en pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle, nous avons réalisé qu'il y avait des options plus intéressantes que le simple fait d'être amis. Et c'est ce jour-là que je lui ai demandé de m'épouser. Elle n'a répondu que quelques mois plus tard » raconte le prince qui se livre dans son intimité. « Nous échangeons fréquemment. Je m'occupe des questions importantes, comme changer le monde et ma femme s'occupe des plus élémentaires, comme les décisions concernant notre familiale et la gestion de nos finances » s’amuse-t-il, un brin facétieux mais amoureux et nostalgique. « C'était un événement d'une grande beauté et symbolique » dit-il à propos de son mariage. Un événement suivi tant au Portugal qu’en Espagne, un pays avec lequel il conserve une profonde affection, notamment pour sa famille avec laquelle il a des liens. « Dans des situations particulièrement difficiles et dans le respect des limites imposées par la Constitution espagnole, les rois d'Espagne ont fait un travail absolument remarquable » déclare le duc de Bragance. Qui ajoute que « le roi Juan Carlos restera dans les mémoires comme un grand roi, un bon chef d'État qui a beaucoup contribué à la paix intérieure de l'Espagne. Au niveau international, notamment en Amérique latine, il a beaucoup contribué à renforcer le prestige de l'Espagne ».
« Je suis associé à la Ligue pour la protection de la nature depuis l'âge de 15 ans et, à mon arrivée, le gouvernement de la Seconde République me considérait déjà comme un gauchiste et un suspect. Ceux qui ont lancé la lutte politique pour la protection de l'environnement et le développement durable étaient les monarchistes, dirigés par l'architecte Gonçalo Ribeiro Telles. Ribeiro Telles est décédé cette année et a été honoré par le gouvernement, admiré même par le président de la République, c’était un visionnaire » poursuit le prince très admiratif. « Il est rentré au gouvernement qu'en 1975 et a fait valoir qu'un roi, à la tête de l'État, était la forme d'organisation politique la plus respectueuse de l'environnement. L'indépendance du roi vis-à-vis des lobbys économiques et des partis politiques donnent également les garanties d'un vrai équilibre politique national » renchérit Dom Duarte. La monarchie peut-elle revenir au Portugal lui pose alors le magazine ? « Selon les derniers sondages d'opinion publique, plus de 30% des personnes interrogées pensent qu'il serait préférable que le Portugal ait un roi. Et dans l'enquête menée par la Commission du centenaire de la République (2010-ndlr), 40% ont répondu qu '«ils ne sont pas républicains». C'est un pourcentage élevé, compte tenu du grand manque d'information qui existe à ce sujet. Les progrès remarquables réalisés par l'Espagne depuis la restauration de sa monarchie ont certainement beaucoup à voir avec ces réponses. La plupart des Portugais admirent la manière dont l'Espagne a évolué, malgré des problèmes avec certaines de ses régions autonomes » conclut en toute simplicité Dom Duarte-Pio de Bragance.
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