« Il se pourrait bien que le peuple portugais veuille de mon fils à la tête de l’état ».Il est l’un des princes le plus convoité du Gotha. Dans son sang coule le sang des Capétiens. Profondément catholique et conscient de ses devoirs à 23 ans, le prince de Beira, Dom Afonso de Bragance, incarne les espoirs des monarchistes portugais qui sont fascinés par ce jeune homme, à la barbe soignée. Rencontre avec le fils de Dom Duarte de Bragance et de Dona Isabel Inês Castro Curvello de Herédia.
Sa naissance a fait les principaux titres de la presse portugaise. Et pour cause. Le 25 mars 1996, Dom Afonso de Santa Maria Miguel Gabriel Rafael a été le premier Bragance à naître dans son pays depuis la chute de la monarchie en octobre 1910. Un événement fêté dans la liesse par les monarchistes et autres nostalgiques, ses parents ont même reçu les félicitations du gouvernement. Baptisé par l’Archevêque de Braga, Monseigneur Eurico Dias Nogueira, à peine dans les langes, il est l’objet de toutes les attentions de la part d’un peuple qui cherche à plonger son regard dans celui de ce prince qui personnifie toute la grande histoire d’un pays qui a colonisé les quatre coins du monde à travers les siècles. Au Portugal, le nom de la maison royale est indubitablement synonyme d’indépendance. En 1644, le duc Jean de Bragance avait pris les armes et chassé les espagnols de cette terre qu’ils occupaient depuis presque un demi-siècle. Depuis, entre deux fados, les portugais fêtent chaque année leur liberté retrouvée.
«Il est passionné par le Portugal et ne cesse de dire qu'il souhaite être au service des portugais » dit de lui son père, Dom Duarte –Pio. Nommé prince de Beira, un titre réservé habituellement aux princes héritiers de la couronne du Portugal, le jeune homme, bientôt rejoint au sein de sa fratrie en 1997 par la princesse Maria Francisca, duchesse de Coimbra et en 1999 par le prince Dinis, duc de Porto.Il va être élevé dans les meilleures écoles catholiques du Portugal. Une religion indissociable de la monarchie. D’ailleurs le prince ne cache pas que le monument qui le touche le plus est l'église de Padroeira, à Vila Viçosa et dont l’histoire est étroitement liée à celle de sa famille. En ce début de vingtaine, Dom Afonso affiche sans complexe son amour pour son pays. Il fait l’éloge de ses compatriotes, vantant la qualité de leur accueil, de leur capacité d’adaptation face aux nombreuses crises qu’ils ont dû affronter dans toute leur histoire et encore aujourd’hui, de son équipe de football qu’il associe à l’esprit de d'unité nationale ou encore la gastronomie portugaise. Effectuant ses études au Royaume–Uni, Dom Afonso, qui a choisi les sciences politiques et les relations internationales, avoue qu’il suit de de très près l’évolution du Portugal en ce domaine. « J’essaye de me tenir le plus au courant possible de ce qui se passe dans mon pays » confesse le prince de Beira qui appelle les jeunes portugais expatriés à revenir dans leur pays et participer à sa reconstruction.
Au Portugal, les monarchistes ont été les premiers en Europe à inclure dans leur programme politique, un chapitre complet sur défense de l’environnement. Dom Afonso a repris ce combat et reconnaît que c’est aussi un de ses credo, n’hésitant pas à affirmer qu’il souhaite que le Portugal reprenne le chemin des grandes découvertes qui ont fait sa réputation durant la Renaissance. Si un quiproquo n’avait pas forcé la fuite du roi Manuel II, il sera le futur roi du Portugal. Il descend de dom Miguel Ier, prince de la Légitimité portugaise qui a régné de 1828 à 1834 avant de finir en exil, banni du royaume pour avoir tenté de déposséder sa nièce et épouse Maria II de son trône et d’avoir essayé d’imposer une monarchie absolue. Pas la tasse de thé du prince de Beira qui ne jure que par une monarchie constitutionnelle. C’est en 1920 que la réconciliation entre les deux branches propulse de nouveau les cadets, dans la course au trône du Portugal. Sans enfants, le roi Manuel II avait désigné, le prince Dom Duarte Nuno (1907-1976) son héritier direct. C’était le grand-père de Dom Afonso.
Le jeune prince croit-il au retour de la monarchie et pense-t-il que cette solution permettrait au Portugal de retrouver sa stabilité ? La réponse ne tarde pas à fuser. «Les meilleures républiques sont celles qui ont des rois et des reines comme chefs d'État. Et je vais paraphraser mon père qui a déclaré les monarchies avaient généralement donné de meilleurs dirigeants que les régimes républicains. C’est pour ces raisons, je suppose, que si le Portugal avait un roi à sa tête, bien que la structure gouvernementale serait la même que celle que l’on connaît aujourd’hui, on aurait une meilleure gouvernance avec de meilleurs résultats ». Avec 40% des portugais qui reconnaissent ne pas avoir de fibre républicaine, 29% qui souhaiteraient le retour d’un roi, des centaines d’élus dans les conseils municipaux et quelques députés acquis à l’idée monarchique, tous les espoirs sont permis. Ici aussi, le prince est de tous les combats aux côtés des jeunes monarchistes qu’il rencontre régulièrement comme les membres de Causa Real (Cause royale) ou du Partido Popular Monárquico (Parti Populaire monarchique).
Opération de charme d’un jeune prince qui fascine et transcende toutes les générations. Y compris la sienne. En 2017, les jeunes du Parti communiste du Portugal avaient eux-mêmes avoués qu’ils n’étaient pas contre l’idée d’un retour à la monarchie. Dom Afonso est très investi dans le caritatif, mettant son temps libre au service des autres. Des actions qui ne passent pas inaperçues dans un pays qui regarde sa famille royale avec tendresse. Durant l’été 2018, il a d’ailleurs fait sensation en s’engageant comme pompier volontaire.
Comme Dom Duarte, le prince entend comprendre et connaître les anciens territoires et autres colonies de l’empire défunt. Il voyage, rencontre toutes les communautés lusophones et passe toutes ses vacances dans des pays ayant été des colonies portugaises. L’année dernière, c’était à « São Tomé e Príncipe, et en coopération avec un évêque local » avait déclaré son père qui note que son fils aîné est aussi « partisan d’une pêche et une chasse responsables »*. En 2014, il a été intronisé «Liurai » (prince) du Timor-Est, un pays qui s’est séparé en 1999 de l’Indonésie et pour lequel le prétendant au trône avait apporté tout son soutien. Et c’est à ce titre que la république a incorporé dans son protocole d’état, rangs et honneurs aux Bragance, reçus comme des chefs d’états.
«Dans un avenir proche, je voudrais suivre les pas de mon père. Avec le cours que je prends, j'ai les bases pour suivre ce qu'il fait. Et je me sens de plus en plus préparé au rôle qui est le mien » martèle le prince de Beira, sourire accroché au visage. Il est célibataire, on ne lui connaît pas de petite amie mais il entend épouser une fille de son rang. Chez les Bragance, il n’est pas vraiment envisagée que l’on accepte, par exemple, l’entrée d’une Meghan Markle, l’épouse du prince Henry de Sussex, au centre d’une polémique et qui trouve son origine dans son comportement incompatible avec les valeurs traditionnelles de la monarchie. Mais tout adulte qu’il soit, il n’en oublie pas d’être facétieux et de vivre avec son temps. Lors d’une récente visite à Paris [où les Bragance rencontre régulièrement les membres de la maison royale d’Orléans (ou de France) avec lesquels ils sont très liés-ndlr], il avait posé de manière humoristique avec son frère, sous une plaque de rue dédiée au portugais. La photo avait fait le buzz sur les réseaux sociaux. Les « Viva o príncipe » s’étaient multipliés sur le net comme les petits pains de Jésus.
« Certains présidents ont réalisé que le rôle que le pays attend du chef de l’état est celui de roi, (…), oui, il se pourrait bien que le peuple portugais veuille de mon fils à la tête de l'État » reconnaît lui-même, un brin songeur Dom Duarte-Pio de Bragance. Une aura qui ne se dément toujours pas aujourd’hui, un prince entre tradition et modernité, prêt à régner un jour, demain sur le Portugal, si le destin le lui permet.
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Publié le 21/02/2020
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