Le « royal baby » de tous les espoirs

«Je suis heureux de partager avec vous ma joie et de vous annoncer que ma femme, Alina-Maria, est enceinte de notre premier enfant, qui naîtra aux environs de novembre». L’annonce a surpris tous les roumains. C’est par un communiqué, publié le 1^er juin sur sa page Facebook, que l’ancien prince héritier Nicolas de Roumanie a annoncé, que lui et son épouse, Alina-Maria allaient être de futurs parents. Tous les yeux sont désormais tournés vers celui qui a été destitué de ses titres par le roi Michel Ier en 2015. En effet, la naissance d’un potentiel garçon pourrait ouvrir toutes les spéculations et permettre au neveu de la curatrice du trône de se repositionner dans la ligne de succession d’une maison menacée d’extinction.

«Protégé par l'amour de ses parents et de sa famille, notre enfant sera éduqué dans le respect de ses ancêtres et des valeurs traditionnelles, dans l'esprit d'amour et des responsabilités qu’il devra assumer enver notre pays, dans la foi en laquelle j'ai été baptisé, comme mon grand-père, le roi Michel». Suivi par 80 000 personnes sur sa page Facebook officielle, Nicolas Medforth-Mills a créé la surprise en annonçant que la naissance à venir d’un enfant dont le sexe reste encore à déterminer. Si la maison royale de Roumanie n’a pas commenté un événement qu’elle estime privé, les partisans du retour de la monarchie ne sont pas fait prier pour féliciter celui qu’ils considèrent encore comme le prince héritier de ce pays des Balkans.

Nicolas Medforth-Mills est le fils de la princesse Hélène de Roumanie et de Robin Medforth-Mills, un ancien haut-fonctionnaire aux Nations-Unies, aujourd’hui décédé. C’est en avril 1992 qu’il effectué son premier voyage en Roumanie aux côtés de ses grands-parents, le roi Michel Ier et la reine Anne de Bourbon-Parme. L’accueil est triomphal. Un demi-million de roumains sont venus saluer leur souverain, renversé en 1947 par les communistes et désormais autorisé à rentrer dans son pays.  «C'était quelque chose de fantastique ! ... De la police à la foule en liesse, toute cette agitation dans la rue ... C'était quelque chose d'unique ! Je me souviens de m’être assis sur le balcon de l'hôtel (Continental - ndlr), face à tous ces gens agitant des drapeaux, des centaines de milliers de personnes qui voulaient nous voir C'était quelque chose d'extraordinaire» explique-t-il en 2018 lors d’une interview, ému. Il a 7 ans et ce voyage va considérablement marquer celui sur lequel le roi à des projets bien établis. Il n’a que 5 filles et à la monarchie, il faut un héritier mâle pour qu'elle survive.

«J'ai appris beaucoup de lui. Je suis également fasciné par son intérêt pour les jeeps militaires, les voitures et la façon dont il cultivait ce passe-temps. Le roi était un homme doté d'un caractère extrêmement fort et en même temps très sympathique et gentil». Nicolas va être élevé auprès de Michel Ier, partageant sa passion pour les voitures. L’heure est à l’idée royale, la restauration est possible. Il va suivre des études au Royaume-Uni dès 1999, voyage en Afrique de l’Est et Australe où il va y travailler entre 2004 et 2006. Un congé sabbatique qui ne lui fait pas oublier ses devoirs. Il revient en 1997 en Roumanie. La même année, le gouvernement redonne sa citoyenneté au roi Michel Ier. Mais c’est véritablement en 2002 qu’il va prendre ses responsabilités de prince héritier. La maison royale le met considérablement en avant et Nicolas Medforth-Mills commence à apprendre le roumain, une langue qu’il se doit de maîtriser comme le français et l’anglais qu’il parle couramment. Le 30 décembre 1997, un demi-siècle après la chute de la monarchie, Michel annonce des changements au sein de la maison royale qui abandonne son nom allemand de Hohenzollern-Sigmaringen pour adopter le nom du pays et modifie les lois de succession. Nicolas de Roumanie est né. Il devient officiellement l’héritier au trône de Roumanie après sa tante, la princesse Margareta et sa mère.

En 2012, il s’installe en Roumanie. Il voyage dans le pays, le succès est immédiat. Le monarchisme a le vent en poupe. Trois ans plus tard, c’est un tsunami qui s’abat sur les monarchistes. Le 1^er août 2015, le roi Michel le prive de tous ses titres sans que la moindre raison ne soit vraiment donnée. Tout au plus évoque-t-il un comportement inqualifiable. La presse s’empare de l’affaire et tente de trouver le pourquoi de cette décision. On parle alors d’une prétendue homosexualité du prince, bien qu’il ait eu des petites amies auparavant, une intrusion dans le milieu affairiste local, une relation hors mariage ou même un complot familial. Les roumains se déchirent comme suivent avec passion les nombreux épisodes qui émaillent ce «dallas des Balkans» aux multiples rebondissements et qui vampirise la presse locale.

La vérité est finalement plus simple que toutes ces supputations glauques auxquelles il a dû faire face. Après des mois de doutes, «l’ex royal» est bien le père d’une petite fille née hors mariage, issue d'une relation avec Nicoleta Cîrjan, rencontrée dans le cadre d’une tournée qu’il a effectué. Le 27 mai dernier, c’est encore lui qui a annoncé que les tests de paternité avaient confirmé un secret de polichinelle au sein de l’état-major monarchiste, proche de la maison royale qui avait imposé une stricte omerta sur le sujet, notamment à la presse étrangère. Les rapports houleux entre la maison royale et le prince n’aidant pas. Une naissance qui n’est pas sans rappeler d’autres divisions au sein de la famlle de Michel Ier. L’enfant adultérin du roi Carol II demeure encore une plaie ouverte au sein des De Roumanie. Dans les années 1990, le sulfureux Paul-Philippe de Hohenzollern-Sigmaringen, petit-fils du roi Carol II, entame une longue procédure judiciaire contre Michel Ier afin de faire reconnaitre ses droits. Elle a finalement abouti en sa faveur en 2012. Devenu prince, il est devenu pour une petite minorité un potentiel prétendant au trône, père d'un garçon, qui n’a pas hésité à se présenter à une élection présidentielle en 2000 (0.5% des voix), accuser publiquement le roi de «collaboration avec les nazis» (non sans avoir reçu une partie de l’héritage de son grand-père en guise de dédommagements) ou tempêter contre la modification de la loi de succession et l'abandon des références germaniques de la maison royale. Une prétention au trône qui a causé de fortes discordes au sein de l’Alliance nationale pour la restauration de la monarchie (ARNM).

Les tensions entre Nicolas Medforth-Mills et la maison royale sont toujours persistantes mais se sont quelque peu apaisées depuis son mariage en grande pompe avec Alina-Maria en 2018.  Bien que la princesse Margarita n’ait pas assisté à la cérémonie, une curatrice du trône qui n’a toujours pas digéré son violent comportement peu de temps avant les funérailles du roi (2017), le prince Nicolas de Roumanie pourrait bien faire son retour dans une ligne de succession devenue quasi féminine et qui laisse la question de son avenir en suspens. Le fils de la princesse Hélène a d’ailleurs fait quelques apparitions discretes lors d’événements familiaux ou nationaux comme lors du centenaire de la fondation de la Roumanie moderne en 2018

Est-il prêt à régner aujourd’hui ? Oui répond le prince «Si le pays, les Roumains me le demandent, je suis prêt à répondre à leur appel» affirme-t-il au journal Coditianul tout en confessant que son modèle reste le prince Charles de Galles, héritier au trône d’Angleterre et très populaire en Roumanie. Cycliste accompli, tourné vers les questions relatives à la défense de l’environnement, le prince se défend cependant de toute ambition. Bien qu’il mène ses propres activités en parallèle de sa tante avec l’ «Asociatia Principele Nicolae», toutes aussi médiatisées. Aujourd’hui, fébriles, les roumains attendent. La naissance d’un garçon pourrait sauver la dynastie royale et permettre la réconciliation à court terme de la maison royale avec son prince héritier en attente. «Tout dépendra du bon vouloir de la maison royale» résume ce prince charmant 2.0.

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