«Majesté, vous n’êtes plus là pour voir ce que sont devenus vos enfants, quelle genre de souffrance ils doivent subir quotidiennement et quelles difficultés ils doivent faire face (...)». A l’approche du 40ème anniversaire de la mort de son mari, l’impératrice Farah Diba a tenu à rendre un vibrant hommage politique écrit et vidéo à son mari, le Shah Reza Pahlavi, décédé le 26 juillet 1980. Partageant sa vie entre l’Egypte où son mari repose, la France et les Etats-Unis, la Shahbanou demeure une icône pour de nombreux iranien(ne)s et l’incarnation du dernier régime impérial de l’ancienne Perse de Cyrus le Grand.
La voix est lente, fatiguée mais remplie d’émotion. C’est en persan, sa langue natale que Farah Diba a rendu hommage au dernier Shahinshah d’Iran, son époux. Couronnée impératrice d’Iran en 1967 au cours d’une cérémonie retransmise dans le monde entier, Farah Diba est entrée dans l’histoire de son pays par la petite porte. Etudiante en architecture à Paris, c’est au cours d’une visite du Shah Mohammed Reza Pahlavi au général de Gaulle qu’elle va rencontrer son futur mari «Tout en cet homme me touchait, m’émouvait profondément» confessera-t-elle volontiers dans ses «Mémoires» parues en 2003. Elle va dès lors partager le destin de l’un des hommes le plus puissant de l’époque. Mais les réformes qu’entreprend le couple impérial vont heurter profondément la sensibilité religieuse des mollahs qui perdent une considérable influence au fur et à mesure que la monarchie se renforce. Abandonnés progressivement par leurs alliés américains, le Shah et la Shahbanou vont devoir faire face à des manifestations contre la monarchie avant d’être contraints de partir en exil. Epuisé, le Shah est déjà malade, atteint par un cancer. Il avait prévu d’abdiquer si la révolution n’avait pas éclaté. Le 27 juillet 1980, il rend son dernier soupir au Caire, en Egypte, la terre des pharaons.
«Majesté, cela fait des années maintenant que vous avez fermé les yeux près du Nil. (…) Votre décès a plongé beaucoup d’iraniens dans le deuil». Farah Diba lit son texte empreint de dignité et de tristesse à la fois. «Vous n’êtes pas là pour voir comme en quarante ans, votre Iran, l’un des pays le plus riche au monde, aujourd’hui, qui s’est transformé en un pays peuplé de gens pauvres, nécessiteux et affamés» poursuit l’impératrice qui entend rappeler à tous que la monarchie (1925-1979) fut synonyme de stabilité économique. «Vous n’êtes plus là pour constater l’emprise du régime religieux qui parle au nom de l’Iran alors qu’il n’est que synonyme de corruption. Les sanctions [imposées par les américains-ndlr], le chômage, la pauvreté et la faim sont à présent le lot quotidien des travailleurs iraniens, dont certains finissent par se pendre » s’indigne Farah Diba qui n’en finit pas de décolérer. «Cinquante–trois ans de monarchie, de réussite sociale, brisées » constate amèrement la Shahbanou qui dresse le bilan du régime du Shah. «Nos progrès étaient loués dans le monde entier et nous avions la reconnaissance des meilleurs experts. De tout l’étranger, on venait travailler avec enthousiasme en Iran. Nous étions des leaders et l'Iran était respecté partout. Nos compatriotes voyageaient partout sans avoir le moindre besoin d’être porteurs de visas» rappelle Farah Diba. «Et vous n’êtes plus là pour voir ce que sont devenus vos enfants, quelle genre de souffrance ils doivent subir quotidiennement et quelles difficultés ils doivent faire face désormais pour entrer dans tels et tels pays» déplore l’impératrice qui égrène un à un les succès de la monarchie Pahlavi. «Ils [les ayatollahs-ndlr] vendent le sol iranien au plus offrant, l’économie s’est effondrée et notre monnaie nationale ne vaut plus rien» regrette-t-elle, toujours d’une voix lancinante.
«La beauté environnementale de notre pays a été détruite en raison de leur négligence, d’une mauvaise gestion de nos eaux souterraines. La pollution en augmentation a créé des maladies qui empoisonnent les iraniens, désormais inquiets de leur avenir et qui n’ont pas le droit de se plaindre. Ils n’obtiennent que pour toutes réponses à leurs protestations que des balles et se font assassiner sur l'ordre des mollahs» dénonce l’impératrice qui renvoie la communauté internationale face à ses responsabilités. En Iran, on meurt dans le plus grand des silences affirme la Shahbanou qui salue également la résistance de ses compatriotes face à cette dictature théocratique.
«Les filles de l’Iran sont notre avenir, vous seriez fier d'elles, Majesté, de les voir défier (…)» ce régime . «La jeunesse iranienne a le grand devoir de sauver la patrie. Ils n’ont pas connu l’âge d’or de l’Iran et en sont conscients. En criant le nom des Pahlavi, ils rendent hommage aux rois d’Iran. (…). Vous avez toujours fait pour maintenir la paix en Iran et éviter les divisions, vous avez transmis votre passion pour l’Iran à votre fils aîné qui porte votre combat. Je suis fier d’avoir un tel enfant» continue la Shahbanou. «Je souhaite qu’un jour, que j’espère proche, tous les enfants de l’Iran seront unis dans le bonheur afin que tous puissent ressentir le sourire de satisfaction de Mohammad Reza Shah Pahlavi, regretté roi d'Iran» conclu avec espoir, Farah Diba, à jamais l’impératrice d’Iran dans le cœur des iraniens et de tous les monarchistes.
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