La récente interview du prince Reza Pahlavi sur CNEWS et la polémique entourant son éviction temporaire de la Conférence de Munich ont mis en lumière les tensions croissantes autour de la question iranienne et son avenir institutionnel.
Fils du dernier Shah d’Iran, Reza Pahlavi, 64 ans, se pose en porte-voix d’une opposition monarchiste et démocratique, appelant les nations occidentales à intensifier leur pression sur le régime en place. Pourtant, son influence sur la scène internationale demeure sujette à de vives oppositions, parfois inattendues.
Un prince en quête d’une transition démocratique
Dans un entretien accordé à CNEWS, le 6 février 2025, le prince Reza Pahlavi a réitéré son appel à un soutien accru des démocraties occidentales envers les Iraniens qui luttent contre la République islamique. Il décrit le régime en place comme « extrêmement répressif » et assure que sa chute est proche. Selon lui, les États-Unis et leurs alliés doivent adopter une nouvelle stratégie, en exerçant une pression maximale pour accélérer la transition politique du pays.
« Les Iraniens me font confiance », affirme-t-il dans son interview. Il assure ne pas mener campagne pour le seul retour de la monarchie abolie en 1979, mais cherche avant tout à être une voix unificatrice de l’opposition. Il cite notamment l’exemple de l’Afrique du Sud post-apartheid, où une transition pacifique a permis d’établir un régime démocratique après des années de répression. « Ce que nous voulons, c’est un processus similaire où le peuple iranien décidera de son avenir à travers un référendum juste et transparent », précise-t-il.
Loin de briguer le trône, afin de fédérer le plus de voix autour de lui, le fils du Shah se positionne comme un leader de transition, souhaitant initier un gouvernement provisoire chargé d’établir une nouvelle constitution. Ce processus démocratique, selon lui, permettrait aux Iraniens de choisir librement entre une monarchie parlementaire et une république ( à jeu égal au sein de la diaspora). Il plaide également pour un Iran pacifié sur la scène internationale, rétablissant des relations amicales avec des pays tels qu’Israël et l’Arabie Saoudite. « Nous pensons dans l’avenir à un Iran qui aura des relations amicales avec tous », déclare-t-il.
L’exclusion controversée de la Conférence de Munich sur la sécurité
Malgré son rôle central dans l’opposition iranienne, devenu un visage connu de tous, le prince Reza Pahlavi a été victime d’un revers diplomatique notable. La Conférence de Munich sur la sécurité, prévue du 14 au 16 février prochain, qui traite des grands enjeux stratégiques internationaux, lui avait initialement adressé une invitation avant de la retirer sous la pression du ministère allemand des Affaires étrangères. Cette décision aurait été motivée par la crainte de nuire aux relations bilatérales avec Téhéran et de mettre en péril la situation des prisonniers allemands en Iran, selon le prince lui-même qui s'est irrité de cette attitude de Berlin dans les médias .
Face à l’indignation suscitée par cette volte-face et les nombreuses critiques sur les réseaux sociaux (notamment celui de X très virulent à l’égard des sociaux-démocrates allemands), la Conférence de Munich a finalement rétabli l’invitation du prince pour son édition 2025, affirmant son engagement à donner la parole à toutes les figures de l’opposition iranienne, sans pour autant lui donner le premier rôle. Dans un souci d'apaisement, Reza Pahlavi a salué cette décision, estimant que son combat ne vise pas seulement à libérer l’Iran, mais aussi à affranchir le monde des menaces posées par la République islamique. « Cette conférence, comme tous les engagements publics, a toujours été l’occasion pour mes compatriotes de faire entendre leur voix sur la scène internationale », a-t-il déclaré dans un message publié sur X.
Selon Karim Sadjadpour, expert du Carnegie Endowment for International Peace, cette pression ne date pas d’hier : « En 2023, plusieurs groupes influents en Allemagne avaient déjà exercé des pressions pour annuler la présence du prince Pahlavi à la conférence » (Aasoo, 2023). D'autres y voient simplement l'ombre du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), dirigé par Myriam Radjavi, qui s'emploie par tous les moyens (notamment médiatiquement) à réduire ou minimiser l'influence du prince impérial au sein de l'opposition au régime des mollahs.
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La place de la monarchie dans l’opposition iranienne
Si le prince Reza Pahlavi ne revendique pas explicitement le retour de la monarchie, il incarne néanmoins une mouvance monarchiste qui conserve une influence non négligeable au sein de l’opposition. Nombre d’Iraniens voient en lui l’héritier d’une époque où l’Iran jouissait d’une plus grande stabilité économique etétait le symbole de puissance géopolitique. Son discours axé sur un Iran laïque et démocratique séduit notamment la jeunesse et la diaspora, en quête d’un leadership capable de fédérer les forces dissidentes. Lors des manifestation anti-régime en Iran, son nom et celui de son grand-père ont été scandés par les Iraniens à de nombreuses reprises. Le régime des mollahs voyant désormais les Pahlavi derrière chaque contestation. De quoi mettre à mal les affirmations du CNRI qui affirment que leurs compatriotes ne voudraient pas d'un retour des Pahlavi sur le trône du Paon. Selon un sondage réalisé par l'institut Gaaman en 2022, 66% des Iraniens de la diaspora avaient une image positive du fils du Shah.
Certains de ses détracteurs considèrent qu’un retour à la monarchie est anachronique et préfèrent miser sur une alternative républicaine qui serait plus acceptée par l'Occident aux aguets. « L'échec de la campagne « Je donne procuration » qui visait à faire de Reza Pahlavi le leader incontesté de l’opposition, en est la preuve éclatante. Les Iraniens de la diaspora ont massivement rejeté cette initiative, montrant ainsi leur absence d’adhésion à ce courant politique » affirme Hamid Enayat, politologue, spécialiste de l’Iran, connu pour sa collaboraion au CNRI, lors d’ un entretien accordé à la Dépêche. Un argument que balaye les partisans du prince. Ils estiment au contraire que son héritage dynastique pourrait jouer un rôle unificateur dans une transition politique post-islamiste. « Ce n’est pas une question de titre, mais de stabilité », affirme un partisan de Pahlavi. « Nous avons besoin d’un symbole qui rassure les Iraniens et les investisseurs étrangers » (IranWire, 2024).
L’héritage du régime du Shah continue cependant d’alimenter le débat sur les réseaux sociaux et les politologues. Certains rappellent les progrès économiques et culturels de l’époque, citant des chiffres impressionnants : dans les années 1970, l’Iran affichait un taux de croissance de 9,8 % par an et possédait l’un des systèmes éducatifs les plus avancés du Moyen-Orient (Banque mondiale, 1977). D’autres, en revanche, soulignent les abus du régime du Shah, notamment la répression du SAVAK, sa police secrète.
Un avenir incertain mais porteur d’espoir
Reza Pahlavi continue de porter la voix d’une opposition en quête de changement, malgré les obstacles qui se dressent sur son chemin. Entre soutiens internationaux fluctuants et rivalités internes, il devra convaincre que sa vision d’un Iran libre et démocratique est viable. Symbole de son combat. Alors que Téhéran fêtait l'anniversaire de sa révolution, la capitale iranienne s'est couverte de cris en faveur du fils du Shah comme le montre une vidéo qui a été mise en l:igne et partagée des dizaines de milliers de fois sur les réseaux sociaux.
La Conférence de Munich 2025 devrait offrir au prince impérial une tribune précieuse, lui permettant de renforcer sa légitimité sur la scène internationale. Reste à savoir si cet élan suffira à infléchir le cours de l’histoire iranienne.
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