La récente annonce du président américain Donald Trump, proposant que les États-Unis prennent le contrôle de Gaza, a suscité un véritable tollé international. Le roi Abdallah II, qui doit rencontrer le dirigeant américain, a fermement rejeté ce projet.
Le roi Abdallah II de Jordanie a fermement rejeté la proposition de l’ancien président américain Donald Trump visant à annexer des terres palestiniennes, de la transformer en « riviera du Moyen-Orient » et de faciliter le déplacement de sa population vers la Jordanie ou l’Égypte. Cette déclaration, qui survient dans un contexte régional déjà tendu, illustre non seulement l’attachement du royaume hachémite à la cause palestinienne, mais aussi le rôle historique et politique de la Jordanie dans le conflit israélo-palestinien.
Un refus afin d’éviter d’attiser les tensions
Très impliqué dans la gestion du conflit israélo-palestinien, le roi Abdallah II a immédiatement réagi aux paroles du dirigeant américain, réaffirmant son refus de toute tentative d’annexion ou de transfert forcé de Palestiniens vers d'autres pays. Depuis l’attentat du 7 octobre 2023, perpétré par le mouvement terroriste Hamas, Palestiniens et israéliens s’affront sous le regard de la communauté internationale qui semble démunie face à cette tragédie. Un conflit qui a coûté de part et d’autre des milliers de morts, avec en fond de toile, la bande de Gaza détruite à plus de 60% par Tsahal, l’armée de l’État hébreu.
Cette position du monarque a été relayée par la cour royale peu de temps avant qu'il ne prenne l'avion pour Washington. Un souverain qui a également insisté sur la nécessité de mettre un terme à l’expansion des colonies israéliennes. Un projet poussé par l’extrême-droite israélienne (membre du gouvernement) qui entend bien s’emparer également de la bande de Gaza et qui ne cache pas ses veilleités de l'annexer. L’opposition jordanienne à ce projet s’explique notamment par la structure démographique du pays. En effet, une part importante de la population jordanienne est d’origine palestinienne, avec plus de deux millions de réfugiés officiellement enregistrés. Y compris jusqu’au sein de la maison royale puisque la reine Rania est elle-même d’ascendance palestinienne. Un telle acceptation du plan de Trump aurait donc risqué d’attiser les tensions internes, dans un pays où la colère contre l’offensive israélienne sur Gaza a déjà provoqué plus d’un an de manifestations.
La Jordanie, un acteur historique et politique central du conflit israélo-palestinien
La Jordanie joue un rôle central dans le dossier israélo-palestinien depuis plusieurs décennies. Gardienne des lieux saints de Jérusalem, elle s’est positionnée comme un médiateur clé entre Israël, la Palestine et la communauté internationale. En 1994, Amman a signé un traité de paix avec Israël, ce qui a permis d’établir une coopération stratégique tout en maintenant son engagement envers la cause palestinienne. Toutefois, les tensions demeurent entre les deux pays et il n'est pas rare que la monarchie multiplie les manoeuvres militaires afin de rappeler à Israël qu'elle peut autant se défendre qu'intervenir en cas de besoin.
Un équilibre qui reste donc fragile. D’un côté, la Jordanie est l’un des principaux bénéficiaires de l’aide américaine au Moyen-Orient, ce qui renforce sa stabilité économique et sécuritaire, en fait un partenaire stratégique pour l'Occident. De l’autre, elle doit composer avec une population largement solidaire des Palestiniens et hostile à toute normalisation des relations avec Israël sans la création d’un État palestinien indépendant.
Un front diplomatique renforcé avec l’Arabie saoudite
Face aux propositions controversées de Donald Trump, le roi Abdallah II a même trouvé un soutien de poids en la personne du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane dont la monarchie reste un allié traditionnel des États-Unis. Lors d’un échange téléphonique, les deux dirigeants ont réaffirmé leur opposition au déplacement des Palestiniens et ont insisté sur la nécessité d’une solution à deux États. L’Arabie saoudite, par la voix de son ministère des Affaires étrangères, a également précisé qu’aucune normalisation avec Israël ne serait envisageable sans l’établissement d’un État palestinien avec Jérusalem-Est pour capitale. Un rapprochement inédit entre les deux monarchies, longtemps rivales, qui a été également marqué par le mariage du prince héritier Hussein de Jordanie avec Rajwa Al Saif, dont les origines sont liées à la maison Ibn Saoud (2023).
Alors qu’il doit être reçu par le dirigeant américain, le 11 février 2025, à la Maison blanche, le rejet du plan Trump par le roi Abdallah II dessine la complexité du rôle jordanien dans la région. Coincée entre ses engagements internationaux et les attentes de sa population, la monarchie hachémite continue de jouer un rôle clé dans le conflit israélo-palestinien et reste incontournable. En s’opposant aux projets d’annexion et de déplacement de populations, la Jordanie réaffirme par sa position officielle, son engagement en faveur d’une paix durable.
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