Après avoir été les premières à introduire sur le « vieux continent », le mariage pour tous entre personnes de même sexe, c’est désormais la question d’un(e) souverain(e) gay, régnant aux côtés de son conjoint(e), qui est posée dans les monarchies. Pays-Bas, Suède, Belgique, Royaume-Uni ou dernièrement le Luxembourg, l’avenir des royautés se dessinerait-il prochainement en couleurs arc-en-ciel ?
Proposée par Netflix, c’est une série fictive qui cartonne actuellement auprès du jeune public européen. « Young Royals » raconte l’histoire du jeune prince héritier (supposé) de cette monarchie scandinave, Wilhelm, qui doit faire face à un dilemme : celui de choisir entre son devoir de futur souverain ou tout sacrifier pour Simon, son amour. A moins qu’il n’arrive à changer les mœurs et concilier les deux. Une fiction qui pourrait peut-être devenir une réalité dans les prochaines années.
« Le gouvernement estime que l’héritier du trône peut épouser une personne du même sexe et ne pas renoncer à son droit au trône ». Déclaration faîte au cours d’une session parlementaire par le Premier minitre, les députés néerlandais avaient demandé à Mark Rutte de se prononcer sur la question d’un(e) souverain (e) ouvertement homosexuel(le) souhaitant régner avec son/sa conjoint(e). Un débat des plus sérieux pour la monarchie batave puisque cette institution est connue pour avoir été la première à introduire l’idée du mariage entre personnes de même sexe (2001) et qui trouve son origine dans la parution d’un livre rédigé un spécialiste en droit constitutionnel qui a mis le feu aux poudres. Selon celui-ci, il lui semblait évident que si la princesse Catharina-Amalia de Nassau, 17 ans, se révélait comme étant homosexuelle, elle devrait renoncer alors à ses droits au trône. « Le gouvernement ne considère donc pas qu’un héritier présomptif ou le monarque doit renoncer au trône s’il/si elle souhaite épouser un partenaire du même sexe » s’est empressé d’ajouter le Premier ministre. Si toute la presse locale a été unanime sur l’esprit d’ouverture de la monarchie, cette question fait désormais boule de neige dans tout le Gotha.
Des monarchies avant-gardistes sur le sujet gay ?
En juin dernier, ce qui était jusqu'ici un secret de polichinelle a été révélé au grand public par le biais d’une simple photo. Prétendant catholique au trône de Bavière et du Royaume-Uni, le duc Franz de Wittelsbach, 87 ans, a posé auprès de son compagnon de longue date. A quelques jours des traditionnelles gay-prides, l’information a submergé les rédactions et fait le buzz, a ravi les uns, horrifié les autres. Âprement commentée sur les réseaux sociaux, ce « coming-out » a provoqué une vaste polémique au sein du royco-land. D’autant plus, le « sang bleu » n’hésite plus à cacher ses préférences, jouer sur les ambiguïtés ou franchir le pas du mariage sans que cela ne déclenche des guerres civiles. Dernièrement, c’est la comtesse María Juncadella von Hohenlohe, cousinant avec un bon nombre de maisons royales, qui a annoncé qu’elle projetait de convoler en justes noces avec sa compagne Carlota Redón, rejoignant un club fermé où s’est déjà illustré le cousin de la reine Elizabeth II, Lord Ivar Mountbatten, marié depuis 2018 à « l’homme de sa vie ».
Le prince William dans les pas de Lady Diana
Si 63% des britanniques affirment « être confortables avec le fait d'avoir un monarque ouvertement gay », la question n’a pas été ouvertement débattue mais ferait l’objet de conversations plus feutrées, notamment au sein de la nouvelle génération de princes et princesses Windsor. En 2019, le prince William de Cambridge a déclaré publiquement qu’il « soutiendrait un de ses enfants » si celui-ci était gay, que ce soit le premier ou le dernier, n'hésitant pas à poser en une de magazines gays comme le roi Felipe VI d'Espagne. Avant toutefois d’ajouter : « La seule chose qui m’inquiéterait, ce serait comment — compte tenu du rôle que mes enfants remplissent — ce serait interprété et vu ». Il est vrai que six ans auparavant, Lord True, membre de la Chambre, avait tenté de faire passer un amendement, juste après l’adoption du mariage gay afin de prévenir la montée sur le trône d’un(e) prince(sse) homosexuel(le) ou tout risques de naissance par fécondation in vitro, se disant « troublé par ce qui lui semblait inéluctable à court terme »
Des lois de succession au trône qui devront s'adapter à court terme
C’est le royaume de Suède qui a été le second à emboiter le pas aux Pays-Bas.Marraine de la gay-pride de cette année, la princesse Viktoria Bernadotte a pris position pour la défense des droits de cette communauté à l'instar de la princesse Marie du Danemark. La question d’un (e) éventuel (e) héritier (e) a été vite clarifiée par le maréchal de la cour. « Il n'y a rien dans l'ordre de succession suédois qui empêche un régent ou un héritier du trône d'épouser une personne du même sexe - sans perdre le trône » a expliqué Fredrik Wersäll. « L'ordre de succession stipule qu'un prince ou une princesse, pour rester dans la succession au trône, doit avoir le consentement du gouvernement pour se marier » tient-il tout de même à préciser. En Belgique, c’est aussi uu sujet qui a agité la monarchie et encore plus la question d’un enfant issu de la PMA qui pourrait prétendre au trône de par son père ou sa mère. « C’est une question théorique », a déclaré le Premier ministre Alexander De Croo qui ne voit pas de problèmes à titre personnel. « La Belgique a été l’un des premiers pays au monde à rendre possible le mariage entre personnes de même sexe. Et un prince ou une princesse héritier a les mêmes droits que tous les autres Belges à cet égard » a déclaré le fonctionnaire royal. Quant à la succession, la princesse héritière ayant des frères et sœurs, il n y aurait donc pas de possibilités pour qu’un enfant issu de la PMA puisse prétendre à quelque chose.
Une question qui divise les Maisons royales
Dernière monarchie en date à s’être emparée du sujet, le Grand-duché de Luxembourg. « L'héritier de la famille grand-ducale peut-il épouser une personne de même sexe ? » pose comme question le quotidien « L’Essentiel » et qui a contacté le secrétariat de la cour. Même son de cloche que les autres comme l’indique le palais qui rappelle que « tous les mariages au Luxembourg sont soumis à la législation nationale, y compris les mariages de la famille grand-ducale conclus au Luxembourg », que « tout mariage au sein de la famille grand-ducale est soumis à l’accord préalable du chef de famille » et qu'il « revient donc au chef de famille de donner son consentement ou non à un mariage entre deux personnes du même sexe ». Hors de question toutefois au nom du « Pacte de famille » qu’un « enfant né par adoption ou don de gamète puisse être considéré comme héritier ». La voie à un(e) prince (sse) régnant(e) et gay est donc ouverte.
S’il est probable que d’autres monarchies soient contraintes de débattre de cette délicate question, au grand dam des monarchistes farouchement hostiles à cette révolution arc-en-ciel dans leur majorité, divers prétendants au trône ont clairement clarifié leurs positions à ce sujet. Brésil (lignée des Vassouras), Portugal, France ou encore Naples (branche calabraise), un certain nombre de monarchies nilotiques (Afrique) n’entendent pas suivre l’air du temps encore moins laisser des femmes accéder au trône préférant suivre les règles de primogéniture masculine en vigueur au sein de leurs familles.
Copyright@Frederic de Natal